Depuis plus de quarante ans, AS-Architecture Suisse* présente un panorama des constructions les plus marquantes du paysage bâti historique et contemporain. Fondée en 1972 par Anthony Krafft, la publication présentée sous forme de fiches à archiver est diffusée par souscription parmi les professionnels de la branche. La pérennité de cette revue trimestrielle est un bel exemple de réussite dans le monde de l’édition.

Maria Teresa Krafft-Gloria, qui a pris les rênes de la publication après le décès de son mari, croit en «la force de l’écrit» et a une conscience aiguë de sa mission: «L’architecte laisse une trace pour l’humanité.» Si la directrice porte à bout de bras cet héritage depuis 1991, c’est bien sûr pour pérenniser une œuvre à vocation didactique, qui constitue en «7000 pages» une sorte d’encyclopédie unique en son genre, évoluant constamment, ayant valeur d’archives et présentant un état des lieux temporaire du patrimoine bâti. Mais c’est aussi par passion pour un métier dont elle veut mettre en exergue la part humaine. Avec une pointe de provocation, l’éditrice évoque sa façon bien particulière d’entrer en contact avec ses interlocuteurs privilégiés, qui par la suite alimenteront la publication: «Les architectes sont très rationnels. Il faut penser à l’influence du pays… La Suisse est calviniste. Quand je leur téléphone, je me présente en disant: «Je suis Italienne, baroque, catholique.»

Au-delà des modes

Ce qui ne l’empêche pas de perpétuer la même mise en page rigoureuse et descriptive qu’il y a quarante ans. Des fiches signalétiques d’objets architecturaux (citant tous les corps de métier ayant participé à la réalisation, de l’ingénieur en statique au chauffagiste), illustrées de photographies en noir et blanc, une information précise, brute, sans fioritures, à l’inverse des revues en papier glacé qui trônent sur les tables basses et que l’on feuillette d’une main. Un inventaire non exhaustif d’œuvres prégnantes, mais aussi d’ouvrages de talents émergents et même d’artistes. «Bien sûr, on y trouve les grands noms de l’architecture contemporaine, mais aussi de jeunes architectes. Mon mari avait déjà ce souci de les mettre en avant car pour lui, les jeunes c’était l’avenir, car ils sont investis d’un élan particulier», déclare l’éditrice, qui évoque aussi sa tendresse pour les autodidactes, citant le Japonais Tadao Ando, illustre exemple.

La publication des Editions Krafft, qui défie les modes, souhaite offrir un réel outil de travail aux architectes, évoquant aussi des thèmes transversaux tels que la notion de «patrimoine», «les hôpitaux» ou encore «les ponts», grâce à des textes éditoriaux, des portraits. Elle traite aussi bien de l’aménagement paysager que de l’urbanisme et ouvre cette année pour la première fois ses pages au design en présentant des pièces de mobilier iconiques mais aussi des projets d’étudiants. G. S.

*Le 190e numéro sortira le 20 septembre