Son charme s'exprime surtout en tête-à-tête. C'est un charmeur. Mais si difficile à appréhender pour ses chefs. Qui peut comprendre le mariage du Carnaval de Bâle et de la Ferrari? Toujours pressé et travailleur, il sait faire la fête avec ses copains bâlois, apprécie le whisky McCallen et fume ses Philip Morris sans ménagement. C'est aussi un fou de belles voitures, et il se permet quelques extravagances qui passent mal dans les milieux protestants du «Basler Daig». En ville, il conduira une Range Rover qu'il aura fait peindre en rouge parce que ce modèle n'est pas disponible et une Ferrari qu'il voudra verte.
Pour grimper dans la hiérarchie, il affrontera l'establishment et les structures très verticales des grandes banques. Ses stages à Londres et aux Etats-Unis lui feront découvrir les mérites de la culture anglo-saxonne.
Trois fidèles alliés
Dirk Schütz nous apprend qu'Ospel est maladivement prudent. Ce n'est pas un trader qui prend de grands paris. Une chance, si on le compare à Mathis Cabiallavetta - qu'il tutoiera très vite ce qui aidera à la reprise de l'UBS -, l'imprudent qui perdra tout dans les acrobaties de Ramy Goldstein et ensuite avec LTCM.
Poussé par sa quête de réussite, Marcel Ospel saura choisir ses amis. Ils veulent l'argent, lui le pouvoir. Le premier des fidèles soutiens, c'est Johannes de Gier, dont il fait la connaissance à Londres à l'époque de SBCI, alors minuscule. Ospel lui plaît: enfin un jeune qui ne cherche pas à rentrer le plus tôt possible à la centrale. De Gier veut être un banquier d'affaires, mais pas un homme de pouvoir, sans cesse en séance. Le deuxième partenaire d'ascension sera Markus Granziol, un académicien au pays des banques, qui veut sortir la SBS des griffes de la vieille génération, celle des crédits, et qui limite son ambition à l'argent. Le troisième sera David Solo, un doué qui fuit la presse, ce qui n'aide pas pour devenir patron.
La culture américaine, Marcel Ospel la vivra à 30 ans, à New York. Le rythme est dément et il aime ça. A 34 ans, il quitte la maison pour Merrill Lynch à Zurich et triple alors son salaire, à plus du demi-million. Mais Européen, le pouvoir lui sera interdit. Il préfère retourner à la SBS et, pour la seule fois de sa vie, accepte une baisse de salaire. Il sera président de la direction en novembre 1995.
S'il fait les bons choix pour sa carrière, ce sont aussi ceux qui propulsent sa banque au firmament de l'industrie. Très vite il sait que sa banque doit reprendre l'UBS. Et ce but atteint, surprise, il n'est qu'à moitié satisfait. Il veut le leadership de la banque d'investissement, une fusion avec Merrill Lynch. Mais les coûts d'intégration sont jugés trop lourds. L'opération est refusée. Mais tant d'autres ont été accomplies. C'est le premier au monde dans la gestion de fortune en attendant le prochain coup d'accélérateur dans la banque d'investissement.
«Herr der UBS», Dirk Schütz, 192 pages, Orell Füssli.