Après la bataille des taxis, place à la bataille des vélos. Alors qu’Uber a annoncé dans la nuit le lancement d’un projet pilote de bicyclettes en libre accès à San Francisco, Zurich est l’un des terrains d’affrontement les plus importants dans cette conquête venue d’Asie et dont la nouveauté est de proposer des vélos que l’utilisateur peut déverrouiller avec son smartphone et déposer à sa convenance sans devoir les ramener à une station, contrairement aux Vélib'.

C’est le singapourien oBike qui a lancé la première grande offensive l’été dernier, inondant la plus grande ville de Suisse de plusieurs milliers de ses vélos du jour au lendemain. Devant la réaction effarouchée des habitants, la start-up, qui n’avait pas demandé d’autorisation, a rétropédalé et retiré une partie de sa flotte pour en garder officiellement environ 500, avant de se déployer vers Winterthour et d’envisager une expansion jusqu’à Genève.

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Or, depuis début janvier, des bécanes jaune et vert ont commencé à narguer les engins jaune et gris d’oBike. Alors que ce dernier est présent dans quelques villes d’Europe, le californien LimeBike a choisi Zurich pour sa première incursion hors des Etats-Unis, où il compte déjà 10 000 vélos et un million de trajets effectués depuis son lancement il y a exactement un an. La société dit avoir trouvé en Zurich une ville «sympathique» où les gens «adorent faire du vélo» et où il existe une population qui correspond à sa cible, de jeunes professionnels et des étudiants.

LimeBike en bonne voie

Contacté, Roman Balzan, qui représente LimeBike à Zurich, explique que la société a commencé avec environ 450 vélos. «Un lancement «soft» pour faire connaître lentement l’offre à la population», qui, poursuit-il, a réagi «positivement»; seuls des dégâts mineurs ont été recensés. Le pionnier oBike avait, lui, dû aller repêcher un grand nombre de vélos dans la Limmat ou dans la Sihl à ses débuts.

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«Malgré le mauvais temps de janvier, nous avons enregistré des chiffres plaisants. Il est trop tôt pour les divulguer, mais nous sommes au-dessus de nos attentes», explique encore Roman Balzan, qui prévoit aussi d’introduire des vélos électriques. La société «discute» avec d’autres villes suisses où elle souhaite s’étendre, mais ne précise pas lesquelles.

Concurrence et fair play

Si oBike a pris de l’avance, LimeBike et son logo en forme de citron vert compte d’autres avantages: des prix moins élevés, pas de caution demandée à l’utilisateur ainsi que des vélos jugés de meilleure qualité et avec des vitesses. La firme californienne a aussi fait preuve de plus de prudence en contactant les autorités et diverses parties avant son lancement.

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Mais la concurrence ne s’arrête pas là. Il faut compter avec Smide et ses vélos électriques, lancé par La Mobilière. Et avec PubliBike, qui est déjà présent à Lausanne et qui commence aussi discrètement, ces jours, à tester son propre service en ville de Zurich, Züri-Velo. Après d’interminables discussions et recours, la filiale de CarPostal a gagné l’appel d’offres public pour proposer ses vélos aux Zurichois. «Nous avons installé trois stations avec 24 vélos, dont la moitié sont électriques», confirme Bruno Rohner, directeur de PubliBike, qui prévoit d’étendre son offre à 150 stations et 2250 vélos de couleur anthracite. Le responsable prend la concurrence «de manière sportive», tout en restant confiant: «Notre modèle se concentre sur le service client et la qualité. On a vu cet été des vélos cassés de concurrents, dont personne ne s’occupe, ce qui déplaît aux citoyens.»

Qui gagnera? Comme les autres systèmes privés de location, PubliBike «devra faire ses preuves sur le marché. Les Zurichois décideront avec leur porte-monnaie quel service ils souhaitent utiliser. C’est le processus le plus démocratique», soulignait ces jours dans la NZZ Filippo Leutenegger (PLR), responsable du Département des travaux publics et de la voirie pour la ville de Zurich.