La place financière suisse a perdu de sa superbe et souffre d’un déficit d’image en Europe. Partant de ce constat, le Conseil fédéral a approuvé mercredi un rapport de 77 pages qui fait le tour de la question. Il propose 25 mesures, parmi lesquelles la «diligence bancaire accrue sur les avoirs non fiscalisés», qui débouchera sur un projet de loi à soumettre au parlement avant l’été 2013. Le gouvernement a ainsi confirmé sa volte-face, comparé à sa première analyse en février, qui prévoyait l’obligation pour les nouveaux clients étrangers de signer une déclaration de fiscalisation des actifs déposés.

Le 22 février, un avant-projet de formulaire avait même été approuvé via une note de discussion du Conseil fédéral. Ainsi, le client devait déclarer qu’il «[avait] annoncé ou [annoncerait] aux autorités fiscales, en toute conscience et dans la mesure requise, les valeurs patrimoniales déposées et les revenus en capital qui en résultent». Ce débat est loin d’être clos puisque le Parti socialiste exige l’introduction de l’auto-déclaration fiscale à partir d’un dépôt de 20 000 francs.

Le rapport approuvé par le Conseil fédéral confirme la volonté politique de poursuivre la stratégie de l’impôt libératoire à la source (accords Rubik), malgré l’échec de celui signé mais pas ratifié par l’Allemagne. La Confédération espère que l’Italie et la Grèce s’ajouteront à l’Autriche et à la Grande-Bretagne, déjà conquis par Rubik. Cette approche n’est cependant pas entièrement satisfaisante, selon le rapport, car la compensation, sous forme d’ouverture accrue du marché européen, ne s’est pas réalisée. Les Etats membres de l’Union européenne (UE) ne sont en effet pas libres d’ouvrir comme ils l’entendent leur marché aux pays tiers à cause d’une nouvelle directive qui va imposer «le passeport UE».

Le Conseil fédéral aimerait donc porter le dossier directement à Bruxelles et a fait savoir qu’il était disposé à négocier un accord-cadre sur l’imposition libératoire à la source qui servirait de base aux futurs accords bilatéraux.

La place financière suisse contribue à 10,3% du produit intérieur brut, en recul de deux points de pourcentage comparé à 2007. Sa croissance dépend en partie du degré d’ouverture du marché européen, en particulier dans le domaine des assurances. En ­raison d’un grand savoir-faire ­hel­vétique dans le secteur de la ­prévoyance professionnelle, le rapport mentionne le potentiel d’expansion en Europe mais souligne aussi les obstacles politiques.

L’accord avec l’UE sur les assurances n’a pas évolué depuis 1989 et se limite aux assurances directes «dommages». Le Conseil fédéral suggère de débloquer la situation en lâchant du lest sur les questions institutionnelles, principal point de crispation entre la Suisse et l’UE sur la manière de contourner l’impasse des négociations bilatérales. Le Conseil fédéral a aussi examiné, avec la branche financière, le potentiel de nouveaux secteurs d’activité. Ainsi, la gestion d’actifs (asset management) devrait devenir un ­pilier de la place financière. Un potentiel bénéficiaire supplémentaire de 700 millions de francs pour les placements alternatifs, et de 200 millions de francs pour les fonds thématiques a été décelé. Cela concerne par exemple les «fonds de fonds» ou la gestion de placements illiquides comme le capital-investissement, les dettes privées ou les infrastructures privées.

Des pistes sont également évoquées pour répondre aux besoins des PME, avec de nouveaux modèles de financement participatif (crowdfunding) ou de capital-risque. Le Conseil fédéral approuve en outre le principe d’allégements fiscaux supplémentaires pour les entreprises dans le cadre d’un troisième paquet de réformes «étroitement lié» au dialogue en cours sur ce sujet avec l’UE.

Bruxelles exige un «passeport européen» pour les services proposés par

les Etats tiers