La Suisse va-t-elle se mettre à fabriquer des masques hygiéniques? Outre-Sarine, deux entreprises envisagent de se lancer dans la production. Car, malgré le fait qu’ils ne sont pas recommandés par les autorités pour se protéger d’une contamination, la demande explose.

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«Nous sommes débordés. Chaque jour, nous recevons 50 à 60 téléphones et autant de personnes qui passent au magasin pour nous demander des masques. Il n’y en a pas, les stocks sont réservés au personnel médical ou aux malades et nous perdons un temps fou à expliquer aux personnes en bonne santé qu’elles n’ont pas besoin de masques», souligne Christophe Berger, pharmacien à Lausanne et président de la société vaudoise de pharmacie.

Une machine pour produire 120 000 masques par jour

Qu’ils soient recommandés ou non, Felix Schönle, patron de Wernli, entreprise spécialisée dans la fabrication de bandages médicaux à Rothrist, en Argovie, est bien décidé à se lancer dans la production de masques hygiéniques à grande échelle: il a investi environ 100 000 francs dans l’achat d’une machine. Face à la demande globale, les délais s’étendent. L’entrepreneur espère être livré début avril, comme prévu: «Je suis en contact chaque jour avec le fabricant chinois», souligne Felix Schönle, qui a déjà commandé du matériel textile en provenance d’Allemagne et d’Europe de l’Est, de quoi produire 6 à 7 millions de masques. Il envisage d’engager jusqu’à dix personnes supplémentaires pour faire tourner la machine 24 heures sur 24. Au maximum de sa capacité, elle peut fabriquer 120 000 masques par jour, dit-il.

«C’est beaucoup, mais les besoins sont importants», ajoute Felix Schönle, précisant qu’on lui a déjà commandé plus d’un million de masques. Ses futurs clients? Hôpitaux, entreprises privées ou encore la Confédération. Wernli entend vendre la pièce à 22 à 25 centimes. En temps normal, le prix à l’unité se monte à 10-15 centimes, précise Felix Schönle. Il s'agit de modèles universels et non de masques chirurgicaux, plus élaborés. «Actuellement, certains distributeurs profitent de l’explosion de la demande pour vendre des masques à un franc pièce, voire bien plus. Je n’ai pas l’intention d’en obtenir le prix le plus élevé. Je souhaite que nous puissions assurer la production.»

Actuellement, il n’y a pas de production de masques hygiéniques en Suisse. Les masques disponibles en pharmacie et dans les hôpitaux suisses proviennent essentiellement de Chine, raison pour laquelle la livraison a été interrompue, indique le Département fédéral de l’économie. En période d’épidémie, lorsque les prix grimpent et que les chaînes d’approvisionnement habituelles ne sont plus garanties, le marché devient rentable pour les entreprises locales. Mais est-ce un créneau durable? L’entreprise FLAWA Consumer, dans le canton de Saint-Gall, spécialisée dans la production de produits en coton, qui prévoit elle aussi de fabriquer des masques en Suisse à partir de début avril, ne l’envisage pas à long terme: «Nous produirons pour aider la population, le temps que durera l’état de nécessité. Puis nous arrêterons. A moins que nous ne constations un intérêt national pour des masques fabriqués en Suisse», précise le directeur général, Claude Rieser.

Utile?

Reste la question de l’utilité des masques. Questionnée à ce sujet mardi dernier encore, Daniel Koch, de l’OFSP, a précisé qu’un masque en soi ne protège pas. «Il faut savoir l’utiliser. Or, le grand public n’a pas la capacité qu’a le personnel de soins de manipuler un masque. Il n’est donc pas prouvé que distribuer des masques au public permette de protéger les gens.»