Les marchés ont réagi en se délestant des emprunts d'Etat italiens, dont les rendements ne cessent de grimper. Le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, a prévenu Rome lundi qu'il n'était pas question pour la zone euro de vivre une nouvelle crise de la dette après celle provoquée par la Grèce, qui avait failli venir à bout de l'euro.
Jean-Claude Juncker: pas de traitement spécial
«L'Italie s'éloigne des objectifs budgétaires que nous avons approuvés en commun au niveau de l'UE», a déclaré Jean-Claude Juncker lors d'un discours en Allemagne. «Je ne souhaite pas qu'après avoir surmonté la crise grecque, nous retombions dans la même crise en Italie. Une crise de ce genre nous a suffit», a-t-il dit.
«Si l'Italie veut un traitement particulier supplémentaire, cela signifierait la fin de l'euro. Il faut être très strict», a-t-il ajouté. Le ministre italien des Finances, Giovanni Tria, a réagi à ces propos en déclarant qu'il ne s'attendait pas à la fin de la monnaie unique.
Giovanni Tria avait promis un peu plus tôt de rassurer ses homologues de la zone euro et de leur dire que son gouvernement avait bien l'intention de réduire la dette publique.
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Pierre Moscovici: non-respect de règles
Pierre Moscovici, commissaire européen à l'économie, a souhaité maintenir le dialogue avec Rome tout en insistant sur le respect des règles budgétaires de l'Union. Le projet de budget italien ne les respecte «manifestement» pas, mais l'ampleur du décalage et «la façon de le combler» doivent être déterminés, a-t-il ajouté.
Valdis Dombrovskis: «pas compatible»
Son collègue Valdis Dombrovskis, un des vice-présidents de la Commission, a jugé pareillement qu'en première analyse, le projet italien n'était «pas compatible» avec le Pacte de stabilité et de croissance de la zone euro.
Giovanni Tria écourte sa présence à Luxembourg
Giovanni Tria, qui devait initialement rester deux jours à Luxembourg, devrait regagner Rome dès lundi soir, après la réunion des ministres de l'Eurogroupe, et faire l'impasse sur la réunion des ministres européens des Finances (qui intègre les pays hors zone euro) programmée mardi matin, a-t-on appris au sein de son ministère.
La dette publique de l'Italie, qui est la plus importante de l'UE après celle de la Grèce, représentait plus de 133% du PIB à la fin du premier trimestre 2018
Ce dernier doit travailler sur les projets budgétaires, précise-t-on de même source. La coalition M5S/Ligue a dévoilé la semaine dernière ses objectifs de déficit mais n'a pas encore publié le document détaillant ses objectifs financiers et économiques pour la période 2018-2021.
C'est le directeur général du Trésor, Alessandro Rivera, qui représentera l'Italie mardi lors de la réunion de l'Ecofin.
Des responsables qui font «du terrorisme sur les marchés»
Le retour anticipé de Giovanni Tria à Rome n'est lié à aucune urgence particulière, a précisé Luigi Di Maio, chef de file du M5S et vice-président du Conseil italien, qui a ajouté que certaines institutions européennes, par leurs commentaires sur le budget italien, «s'amusaient à faire danser les «spreads» (ndlr, l'écart de taux entre pays de la zone euro) et à faire du terrorisme sur les marchés».
Bruxelles peut entamer une «procédure de déficit excessif» lorsque le déficit budgétaire d'un Etat membre de la zone euro dépasse 3% du PIB ou lorsque la dette est supérieure à 60% de ce PIB et qu'elle ne diminue pas de façon satisfaisante. Celle de l'Italie, qui est la plus importante de l'UE après celle de la Grèce, représentait plus de 133% du PIB à la fin du premier trimestre 2018, selon l'office de statistiques Eurostat.