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Il a estimé que les faits de rébellion, avancés par la justice espagnole pour l’organisation du référendum sur l’indépendance de la Catalogne à l’automne, ne pouvaient être retenus au regard du droit allemand, car ils supposeraient que Carles Puigdemont se soit directement rendu coupable de faits de violence. Le tribunal «est d’avis qu’une extradition pour motif de rébellion est irrecevable», a-t-il indiqué dans un communiqué.
Seules les accusations de détournements de fonds publics, en lien avec l’organisation de cette consultation, peuvent à ses yeux constituer un motif de remise à l’Espagne, sous réserve d’un examen plus approfondi qui va avoir lieu dans les jours et semaines à venir. Mais elles sont trop faibles à ses yeux pour justifier un maintien en détention.
Un revers pour Madrid
La juridiction a en conséquence ordonné la remise en liberté de Carles Puigdemont sous contrôle judiciaire, la conditionnant notamment au paiement d’une caution de 75 000 euros (environ 88 000 francs), dans l’attente de l’examen de la demande d’extradition pour détournement de fonds. Aucun détail n’a été immédiatement fourni sur le moment où l’indépendantiste catalan quittera sa prison de Neumünster dans le nord de l’Allemagne.
Cette décision prend le contre-pied des réquisitions du parquet général allemand. Il avait demandé mardi le maintien en détention de Carles Puigdemont et reconnu la validité en droit allemand des deux chefs d’inculpation de la justice espagnole, à savoir «rébellion» et «détournement de fonds».
La notion de «rébellion» n’existe certes pas stricto sensu dans le droit national allemand. Mais elle se rapproche de celle de «haute trahison», inscrite elle dans le Code pénal allemand, et une équivalence exacte n’est pas nécessaire pour procéder à une extradition, avait estimé en substance le parquet général.
L’Espagne ne commente jamais les décisions de justice, tout particulièrement lorsqu’il s’agit de décisions de justice d’un autre tiers
Une porte-parole du gouvernement espagnol
Surtout, le tribunal allemand inflige un revers aux autorités espagnoles. Si Carles Puigdemont n’est remis à l’Espagne que pour détournements de fonds, c’est le principal pan de l’accusation de Madrid qui tombera. Il ne pourra en effet pas être jugé pour rébellion en Espagne.
Puigdemont défend l’absence de violences
Carles Puigdemont est poursuivi dans son pays à la fois pour «détournements de fonds» publics pour avoir organisé un référendum jugé illégitime par Madrid – dont le coût a été évalué par la justice espagnole à 1,6 million d’euros – mais surtout pour «rébellion» à la suite de la déclaration d’indépendance.
Le gouvernement espagnol a dit jeudi soir respecter la décision du tribunal du Schleswig-Holstein. «Le gouvernement ne commente jamais les décisions de justice, tout particulièrement lorsqu’il s’agit de décisions de justice d’un autre tiers», a dit une porte-parole du gouvernement.
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Pour éviter une remise à l’Espagne sous ce chef d’inculpation, passible de 30 ans d’incarcération en Espagne, Carles Puigdemont avait présenté lundi en Espagne un recours contre son inculpation pour «rébellion». Il y avait souligné l’absence de violence dans ses actes. L’ancien président catalan, destitué par Madrid après la vaine déclaration unilatérale d’indépendance de la Catalogne le 27 octobre, a été interpellé fin mars dans le nord de l’Allemagne, alors qu’il rentrait à Bruxelles après une visite en Finlande. Il est détenu depuis à Neumünster.
Dans la soirée, le parquet fédéral belge a de son côté annoncé la remise en liberté conditionnelle de Merixtell Serret, Anton Comin et Lluis Puig, trois des ministres indépendantistes catalans qui avaient accompagné Carles Puigdemont dans son exil. Egalement visés par des mandats d’arrêt européens, ils s’étaient rendus à la police belge jeudi. «Le dossier sera renvoyé maintenant à la chambre du conseil de Bruxelles qui devra se prononcer sur l’exécution des mandats d’arrêt européens», a indiqué le parquet.