Le défi des compétences: vers un nouveau paradigme
Emploi
CHRONIQUE. La nécessité de faire évoluer nos compétences techniques est devenue presque banale. En ce qui concerne nos compétences comportementales, c’est une tout autre histoire. Notre chroniqueur nous explique pourquoi

Les talents humains ont de tout temps contribué à l’innovation et à la prospérité des entreprises. Deux grands changements mettent néanmoins en péril cet axiome. Le premier: les disruptions technologiques et industrielles toujours plus fréquentes et rapides. Pour exemple, Daimler vient d’annoncer la suppression de 10 000 postes dans les deux prochaines années, qui s’ajoutent aux 50 000 déjà communiqués en Allemagne dans l’automobile. La reconversion à l’électrique en est la cause principale.
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Le second est lié aux modifications démographiques, avec le départ à la retraite de 800 000 baby-boomers dans les dix prochaines années. Dès 2021, le solde entre les départs à la retraite et les nouveaux entrants sera négatif pour la première fois depuis des décennies.
La guerre des compétences est ainsi prête à s’intensifier drastiquement. Mais au fait, de quelles compétences parle-t-on? D’abord les compétences techniques, ou «hard skills», qui sont les plus sujettes à une obsolescence rapide, et donc les plus difficiles à anticiper. Nombre d’organisations ont donc mis sur pied des programmes massifs d’évolution des savoirs, et de reconversion des compétences. Le défi est déjà colossal, mais ce n’est pourtant que de la roupie de sansonnet!
Les «soft skills» ne s’apprennent pas en quelques jours
En effet, les compétences comportementales, ou «soft skills», posent des défis encore plus aigus, car elles sont le fruit d’une histoire de vie, et possèdent donc une inertie à l’acquisition beaucoup plus importante que les savoir-faire. Comment maîtriser rapidement l’adaptabilité au changement, l’agilité à apprendre, ou la capacité à l’innovation? En tout cas pas en quelques jours de cours. En conséquence, Novartis annonçait en septembre un programme destiné à «inspirer la curiosité». Cela se traduit par des concours de résolution de problèmes, un portail digital d’expériences formatrices, et même un #IamCurious où tous les employés peuvent partager leurs vécus de la curiosité à travers le monde. Mais pourquoi donc la curiosité? En tant que méta-compétence, elle représente un précurseur pour l’acquisition d’autres compétences comportementales telle la créativité, la maîtrise du changement ou la remise en question du statu quo. Chez Microsoft, le programme «Mentalité Croissance» vient dans la même veine d’être lancé.
Ces compétences soft sont d’autant plus importantes que la plupart des entreprises ne font pas face à des défis techniques insurmontables. VW, Facebook, Airbus n’ont pas de problème de stratégie technologique, mais d’éthique, de culture, de valeurs, d’organisation et de leadership, tous reliés à des compétences «soft».
Cette évolution nous questionne sur l’acquisition et le développement de nos savoirs. Comment, de l’enfance à l’âge adulte, développons-nous les méta-compétences telles que courage, ténacité, curiosité, empathie?