Quels indicateurs pour mesurer la gestion du capital humain?
Ressources humaines
AbonnéCHRONIQUE. Mesurer l’efficience de la gestion du capital humain n’est pas encore à l’agenda de nombre de directions ou de conseils d’administration. Notre expert en Ressources humaines nous offre toute une série de pistes pour combler ce manque

Le coût du personnel représente aisément 60% ou plus du total des coûts opérationnels en entreprise, ce qui devrait logiquement placer la gestion du capital humain au cœur des préoccupations des directions et des conseils d’administration. Pourtant, et de façon surprenante, ce thème est traité de manière peu systématique dans beaucoup d’organisations. Pour pallier ce manque, voici un petit guide des principaux indicateurs à faire figurer sur le tableau de bord RH de toute direction et conseil d’administration.
Le premier thème concerne l’efficience de l’organisation. Je recommande tout d’abord un indicateur à suivre sur la durée: combien de chiffre d’affaires est généré pour 1 franc de salaire payé. Une autre mesure indispensable évalue l’efficience de la structure organisationnelle: l’étendue des responsabilités («span of control»), à savoir le nombre moyen de collaborateurs par manager. Il ne devrait pas se situer en dessous de cinq ou six selon les meilleures pratiques. Avec le choc démographique des baby-boomers, le taux de succession pour les postes clés est primordial. Il permet de mesurer combien de postes ont un successeur identifié, quel est son degré de préparation et à quel horizon temporel.
Les taux de départ des employés et l’absentéisme
Deux grands classiques ensuite: les taux de départ des employés et l’absentéisme. Pour le premier, on s’assurera d’exclure le turnover fonctionnel: les moins bons performeurs et les retraités. Le taux de départ à douze ou dix-huit mois est également utilisé pour jauger de l’efficacité du recrutement. Pour l’absentéisme, il convient d’affiner la mesure, et de se concentrer sur l’absentéisme de courte durée, ainsi que le nombre de jours perdus pour cause de burn-out.
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Le second thème a trait aux aspects financiers. On juge souvent l’exposition de la caisse de pension comme risque principal. C’est bien, mais notoirement insuffisant. Dans l’environnement volatil actuel, il convient de mesurer quelle est la proportion des coûts salariaux variables comparés à la masse salariale totale. On évalue ainsi la capacité de l’entreprise à réduire ses coûts du personnel sans devoir licencier. Concernant le turnover et l’absentéisme, il faut les estimer en termes de coûts, à savoir en francs, ce qui provoque souvent une prise de conscience immédiate de leur impact financier massif.
Le troisième thème se consacre à la réputation, élément incontournable dans un monde digitalisé. Le plus important est le taux de recommandation ou Net Promoter Score, à savoir le nombre d’employés nets recommandant l’entreprise en tant qu’employeur. Il est simple et rapide à mesurer lors de sondages éclair. Logiquement, l’attractivité du recrutement doit également être appréhendée avec des indicateurs tels que le nombre de vues, de candidatures spontanées, et de candidats pertinents par poste ouvert. La réputation de l’entreprise comme employeur s’évalue également avec la mesure des médias sociaux (Social Listening), les rankings sur des sites comme Glassdoor, etc.
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Au vu de la sensibilité croissante sur le sujet, tout conseil d’administration devrait aussi mesurer annuellement le taux de discrimination salariale homme/femme, ainsi que l’écart salarial entre le plus haut et le plus bas salaire. De même, la proportion de femmes à toutes les strates de l’entreprise devrait être monitorée avec attention. Comme pour beaucoup d’indicateurs, leur évolution dans le temps est plus pertinente qu’une mesure statique.
Comme on peut le voir, même les RH n’échappent pas à l’adage qu’on ne gère bien que ce que l’on mesure.
*Alain Salamin, consultant en rémunération et expert externe pour le Bureau vaudois de l’égalité