L’Université de Genève lance un cursus pour séduire les sociétés étrangères
Formation
L’ex-directeur de la promotion économique de Suisse occidentale, Philippe Monnier, enseignera les techniques pour attirer et retenir les multinationales. Objectif: mieux vendre les atouts et minimiser les faiblesses de la place helvétique

La promotion économique exogène n’est pas un privilège exclusif des agences étatiques. De nombreux avocats, fiduciaires, consultants et autres fiscalistes exercent également cette activité, ne serait-ce que pour alimenter leur portefeuille en clientèle étrangère.
En ces périodes de tumultes liés notamment au franc fort, ou d’incertitudes découlant de la mise en œuvre prochaine de l’initiative «Contre l’immigration de masse» et de la réforme de l’imposition des entreprises (RIE III), voire même d’opportunités liées au Brexit, le rôle de ces acteurs privés a même gagné en importance. Raison pour laquelle l’Université de Genève a décidé de lancer un cursus technique, destiné aux professions libérales, mais ouvert aussi aux traditionnels spécialistes du secteur public, intitulé «Comment attirer et retenir les sociétés étrangères?».
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Le premier module est prévu les 7 et 8 octobre prochains. «Selon la demande, il pourrait être dispensé deux fois par année, à raison d’un peu plus de dix participants», indique Philippe Monnier, cheville ouvrière du programme et ex-directeur du Greater Geneva Bern area (GGBa), organe de promotion économique commun aux cantons de Berne, Fribourg, Vaud, Neuchâtel, Genève et du Valais. Prix pour chaque leçon de deux jours: 1500 francs, un rabais de 300 francs étant accordé aux membres de l’Observatoire des Valeurs de la Stratégie et du Management (OVSM) rattaché à l’alma mater genevoise.
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Structure la mieux adaptée
Dans le détail, le cours prévoit de passer en revue les écosystèmes clés du pays, comme le négoce de matières premières, les secteurs bancaire et financier, la micro/nanotechnologie, etc. «Les secteurs phares sont les sciences de la vie, principalement les medtechs, mais aussi les biotechs, ainsi que l’informatique dénombrant de multiples sous-segments», relève celui qui, entre 2010 et 2015, a contribué à implanter plus de 300 sociétés étrangères dans la région.
Le programme vise également à détailler les raisons sociales les plus intéressantes pour la Suisse, tels les sièges régionaux, les centrales d’achats, les filiales de gestion de la propriété intellectuelle, ou encore les succursales de ventes internationales. «Si par exemple une entreprise souhaite installer une antenne opérationnelle en Suisse, l’idée est de définir en plus s’il ne serait pas opportun d’ajouter des fonctions de régulation et, pourquoi pas, d’essais cliniques. Ou si c’est trop cher, au moins d’inclure une cellule de gestion de la recherche», préconise l’actuel administrateur et consultant pour plusieurs multinationales intéressées par les conditions-cadres helvétiques, également représentant d’«Invest Japan» en Suisse.
Etudier l’ennemi
Parmi les autres sujets abordés durant la formation: le Swissness, le coût de l’emploi, la fiscalité, le droit du travail et des entreprises, les accords de libre-échange, etc. «Pour chaque domaine, nous aborderons les atouts de la Suisse et la manière de contrecarrer ses faiblesses», précise Philippe Monnier. C’est-à-dire? «Par exemple, si c’est la cherté de la place helvétique qui pose problème, il s’agira de la pondérer en expliquant que notre pays connaît peux de grèves et dispose d’une législation sur le travail plus souple, où que les charges sociales y sont jusqu’à plus de deux fois inférieures que chez nos voisins», énumère celui qui a exercé des fonctions dirigeantes chez McKinsey, Schindler et a cofondé trois start-up actives dans le commerce électronique.
La rivale principale: l’Irlande
Autre élément du cours: les forces et lacunes des principaux concurrents de la Suisse, comme l’Irlande, les Pays-Bas, l’Allemagne, Singapour, etc. «La rivale la plus sérieuse est l’Irlande, qui présente l’avantage d’être une place économique bon marché, anglophone et dotée de fortes compétences locales. Elle a toutefois l’inconvénient d’être excentrée par rapport au cœur de l’Europe, d’afficher certaines contraintes légales en matière d’immobilier commercial et de n’avoir que peu de savoir-faire en matière de medtech ou de biotech», signale Philippe Monnier.
Qu’en est-il de Singapour? «Pour y avoir vécu, je dois reconnaître que les progrès – dans les domaines de la banque privée, du négoce et même des sciences de la vie – effectués par cet Etat sont impressionnants. A part le fait que cette place n’est pas adaptée pour des quartiers généraux européens, il n’y a pas grand-chose à redire», conclut-il.