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La carte mondiale syndicale est entièrement redessinée à Vienne

Deux confédérations unissent leurs forces et créent la Confédération syndicale internationale. Elle réunit 360 centrales de 160 pays et défendra 170 millions de travailleurs.

C'est une fusion qui va sans doute marquer l'histoire syndicale du monde. La Confédération internationale des syndicats libres (CISL) et la Confédération mondiale du travail (CMT) unissent leurs forces et fondent la Confédération syndicale internationale (CSI). Cette nouvelle entité assemblera 360 centrales syndicales de 160 pays.

La fusion sera entérinée lors d'un congrès qui réunit près de 1500 délégués du 1er au 3 novembre à Vienne. L'Anglais Guy Ryder, l'actuel secrétaire général de la CISL, sera vraisemblablement élu à la tête de la CSI. Il a déjà donné le ton. Sa priorité est de construire des «stratégies pour contrer celles du capitalisme dont la mondialisation se fait au détriment des salaires et pour se confronter aux multinationales». Outre l'objectif d'accroître son influence dans le monde du travail, la CSI entend renforcer sa collaboration avec la société civile, notamment avec le mouvement altermondialiste.

Cette fusion intervient à point nommé. «Le mouvement syndical évolue actuellement dans une atmosphère hostile», explique Luc Demaret, chargé de l'information sur les relations industrielles au Bureau international du travail (BIT) à Genève. De nombreux gouvernements néolibéraux accordent peu d'espace aux syndicats. Aussi, la liberté des travailleurs est bafouée par des régimes peu respectueux des droits de l'homme. Une centaine d'activistes ont été assassinés en 2005 à cause de leurs activités syndicales et des dizaines de milliers ont été licenciés pour la même raison.

La création de la CSI intervient également à un moment où il y a une désaffection pour le mouvement syndical. Luc Demaret relativise. «Il ne faut pas juger la force des syndicats par le nombre d'adhérents. En cas de crise, c'est la majorité des travailleurs qui se mobilise.» Au début de l'année en France, alors que moins de 10% des travailleurs sont syndiqués, 80% d'entre eux sont descendus dans la rue et ont fait reculer le gouvernement sur les emplois des jeunes. «La capacité de mobilisation reste entière», explique Luc Demaret. Il fait encore ressortir que même si la majorité des travailleurs ne sont pas membres d'un syndicat, ils sont quand même protégés par des conventions collectives.

Le BIT voit la naissance du géant syndical d'un bon œil. «Les travailleurs font souvent les frais de la division syndicale. Désormais, le signal donné à Vienne aura des répercussions sur la cohésion au niveau de chaque pays, estime-t-il. Cette cohésion portera aussi des fruits au sein du BIT qui est un organe tripartite de négociations (Etats, patrons et travailleurs).»