L’âge d’or des entreprises européennes en Chine est révolu. En 2015, elles ont investi 9,3 milliards d’euros, en baisse de 9% par rapport à 2014. Des chiffres qui contrastent singulièrement avec les investissements chinois en Europe pour la même période: 20 milliards, en hausse de 44%. Selon les résultats d’une enquête auprès des multinationales occidentales installées en Chine pour le compte de la Chambre du commerce Chine-Europe (CCCE) et dont les résultats ont été publiés le mois dernier, 55% d’entre elles affirment être moins confiantes que par le passé.

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De ce fait, les entreprises européennes, mais aussi américaines, tirent la sonnette d’alarme et accusent Pékin d’avoir rendu le marché chinois plus difficile d’accès. «Le ralentissement économique de la Chine a frappé les entreprises étrangères et locales, a souligné Jörg Wuttke, président de la CCCE, à l’occasion de la publication du sondage. Mais les entreprises étrangères ont souffert davantage à cause d’un environnement qui leur est devenu plus hostile et qui favorise les entreprises indigènes.»

Mesure de rétorsion ou pas

Dès lors, la CCCE dénonce le paradoxe: d’une part, les entreprises chinoises multiplient les acquisitions en Europe et de l’autre, elles se ferment aux capitaux européens. Des propos repris par Sigmar Gabriel, vice-chancelier allemand lors de sa visite cette semaine en Chine, où il a dénoncé des règles chinoises qui rendent les investissements européens plus difficiles. Mesure de rétorsion ou pas, Berlin vient de suspendre la vente de deux entreprises allemandes aux capitaux chinois.

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A Bruxelles, BusinessEurope, une organisation patronale paneuropéenne, réclame la réciprocité pour les entreprises européennes en Chine. La Commission européenne ne dit pas autre chose. «Nos entreprises se confrontent à de nombreuses barrières en Chine, a affirmé Daniel Rosario dans une interview accordée au journal de l’EU-China Business Association, basée à Bruxelles. Nous sommes préoccupés par les récentes mesures qui ne respectent pas le principe d’une même règle pour tous.» Désormais l’UE mise sur la conclusion d’un accord sur les investissements Chine-Europe pour remédier à la situation.

Aucune entreprise suisse ne s’est plainte

Président de la section romande de la Chambre de commerce Suisse-Chine et ancien ambassadeur suisse à Pékin, Blaise Godet, relativise le protectionnisme chinois. «Ce n’est pas une surprise que Pékin n’ouvre pas certains secteurs comme l’énergie, la défense ou encore la presse aux capitaux étrangers, dit-il. Pour ce qui est de l’activité industrielle, on peut comprendre que la Chine soit plus sélective et préfère les entreprises à haute valeur technologique.» A sa connaissance, aucune entreprise suisse n’a eu à se plaindre des restrictions aux investissements en Chine. «Je ne crois pas que Novartis regrette d’avoir investi un milliard de francs pour son centre de recherche à Shanghai», dit-il.

Hosuk Lee-Makiyama, directeur de l’European Centre for International Political Economy, un centre d’analyses économiques à Bruxelles, va dans la même direction. Selon lui, la Chine, après une première phase de développement où elle a accueilli toutes sortes entreprises, y compris polluantes, peut désormais se permettre d’être sélective. «Aujourd’hui, la priorité va aux entreprises de services qui pèsent de plus en plus dans l’économie chinoise et qui créent des emplois pour les milliers de jeunes diplômés arrivant sur le marché du travail, explique-t-il. Ces derniers ne veulent plus travailler dans des usines Foxtron qui assemblent les produits Apple.»