Il y a dix ans, la crise des «subprime» plongeait les Etats-Unis dans un profond ralentissement économique. Avec à la clé des centaines de milliers d’emplois perdus dans les banques, l’automobile et la construction, pour un taux de chômage de 10% en 2010. Du jamais vu depuis la Grande Dépression des années 1930. La contagion a rapidement gagné l’Europe, dont la situation a été aggravée par la crise de la dette. Récession oblige, les entreprises ont mis des milliers d’employés à la porte. Le taux de chômage sur le Vieux-Continent a alors dépassé les 12%. Et près de 25% dans certains pays comme l’Italie, la Grèce ou l’Espagne.

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Dix ans après, c’est la fin du cauchemar. Les pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) sont sortis du tunnel grâce aux réformes structurelles ainsi qu’aux mesures de soutien de l’économie prises par les banques centrales.

Situation contrastée en Europe

Les Etats-Unis connaissent même presque le plein-emploi. En Europe, qui a retrouvé le chemin de la croissance, certes avec du retard, la situation est contrastée. En Allemagne, et dans les pays nordiques, le taux de chômage a fortement baissé. En Europe du Sud par contre, des millions de personnes en âge de travailler ne trouvent pas de travail. Mais la tendance va dans la bonne direction. Dans son dernier rapport sur «Le marché de l’emploi 2017» publié le mois dernier, l’OCDE affirme que le niveau de chômage devrait revenir à son niveau d’avant-crise d’ici à la fin de 2018 ou au début de 2019. En Europe, on observe aussi un rattrapage des salaires.

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Pourtant, l’OCDE note que les salariés ne ressentent pas les effets en termes de conditions de travail. Une étude publiée en mai dernier en marge d’une réunion de ministres de Travail du G20, la Confédération syndicale internationale (CSI), qui regroupe des syndicats nationaux, fait ressortir que 73% des salariés craignent de perdre leur emploi. Ils sont 80% à affirmer que les salaires minimums ne suffisent pas à joindre les deux bouts. Selon la start-up Earnest, spécialisée dans le crédit à la consommation, 60% des collaborateurs de l’économie du partage (Uber, Airbnb, Getaround ou Postmates) gagnent entre 98 et 924 dollars par mois (92 à 873 francs). La plupart d'entre eux affichent un revenu mensuel inférieur à 500 dollars.

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A Genève, le Bureau international du travail fait le même constat: les salariés ont contribué à augmenter la productivité et la rentabilité des entreprises, mais sans aucun droit aux gains. Son économiste principal, Steven Tobin, craint que les emplois précaires et les employés insatisfaits ne soient la source d’une frustration et d’une colère qui viendraient alimenter le discours contre le libre-échange, l’innovation et la technologie.