Arrivé en novembre à la direction d'Orgexpo – la fondation chargée de la gestion et de la promotion de Geneva Palexpo –, Claude Membrez (39 ans) a trouvé une institution en pleine difficulté. Le départ précipité de son prédécesseur Bruno Lurati, la perte de l'exposition Telecom (départ pour Hongkong) ou encore l'annonce d'un plan de restructuration ont marqué 2004. Une année noire qui s'est soldée par un déficit de 6 millions de francs. Chargé de restaurer la confiance auprès de ses 120 collaborateurs et du canton, le Genevois expose ses priorités.

Le Temps: Vous accueillez ces jours le Salon de l'auto. Que signifie cet événement pour vous?

Claude Membrez: Ce Salon, né il y a cent ans, est le moteur de la construction et du déménagement de Palexpo au Grand-Saconnex en 1981. Il est important de le rappeler. Il est sa raison d'exister. On raconte à tort que Palexpo a été construit pour Telecom. Nous n'avons pas réalisé une nouvelle halle pour faire plaisir à

M. Utsumi, le secrétaire général de l'UIT. Nous nous sommes dit: «le Salon et Telecom ont des besoins, agrandissons».

– Où en est justement le dossier Telecom?

– On parle de Telecom Monde, mais désormais aussi de Telecom Europe. On ne sait pas quand, qui, pourquoi. Tout change rapidement. Cela reste un dossier très important. Des ambassadeurs travaillent même dessus. Sa gestion globale cependant relève du canton.

– Le Salon de l'auto est aujourd'hui la seule grande manifestation genevoise. Quelle part de votre budget représente-t-il?

– Je ne peux pas vous répondre de manière claire, car notre activité est très cyclique. Nous savions déjà, il y a quelques années, que 2004 serait difficile. L'exercice en cours sera à nouveau différent. Le poids du Salon de l'auto, lui, varie entre 25 et 40%. Disons en moyenne un tiers de notre budget. Quant à notre chiffre d'affaires, il s'élève en moyenne à 50 millions par année.

– Plus de cent jours après votre arrivée, avez-vous défini une stratégie?

– Il est difficile de parler de stratégie. Palexpo est un bâtiment conçu par les collectivités publiques. Il poursuit quatre objectifs. Il doit permettre de dégager des effets économiques sur la région. On évalue à 400 millions chaque année ses retombées directes sur Genève. Il entend aussi faire rayonner le nom de Genève en Suisse et dans le monde. Le concours hippique international ou la Coupe Davis de tennis y contribuent, par exemple. Palexpo est ensuite au service de la population et pas seulement d'une élite. Le Supercross répond à ce besoin. Enfin, nous devons nous débrouiller pour entretenir la «maison», c'est-à-dire changer une porte ou refaire les peintures. Tenant compte de ces objectifs, nous ne sommes pas une entreprise comme les autres. Nous sommes avant tout un outil à la disposition de notre économie, comme le pont Butin ou l'Université.

– Deux options se proposent toutefois. Etre un simple loueur de surfaces ou intégrer toutes les fonctions en étant organisateur et propriétaire de Salons. Quel modèle privilégierez-vous?

– Tout est ouvert. On est évidemment plus durable, si l'on possède un Salon. EIBTM (ndlr: foire internationale consacrée aux voyages d'entreprises) ne serait pas partie, si tel avait été le cas. Seulement, être propriétaire cela coûte de l'argent et nous n'avons pas beaucoup de moyens. Dans le cas de S-DEV, le salon sur le développement durable qui se tiendra pour la première fois en octobre, nous agissons en tant qu'organisateur avec l'appui de la DDC à Berne, de la Ville et du canton de Genève.

– Avant d'être nommé à Genève, vous avez dirigé Forum Fribourg, le centre d'expositions fribourgeois. Une coopération des places de foires romandes aurait-elle du sens?

– ll est imaginable de se donner ponctuellement un coup de pouce. Je n'envisage par ailleurs pas de faire un Salon Habitat & Jardin comme à Lausanne. Par contre, chaque ville a son attractivité. Et si nous sommes en concurrence pour un congrès médical international, c'est le meilleur qui va gagner. Cette concurrence est saine. Excentré au niveau géographique, Genève n'est pas bon sur les expositions nationales. Le Salon de l'auto étant l'exception qui confirme la règle. Nous sommes plus actifs au niveau international. Et là, nous sommes en concurrence avec Barcelone, Amsterdam, Vienne, Copenhague, Göteborg mais aussi Prague et Varsovie.

– Vous avez acquis une expérience nationale à Fribourg. N'est-ce pas paradoxal de vous voir à la tête d'une institution qui vise un marché international?

– Palexpo couvre le monde entier depuis vingt ans. Nous avons trois personnes qui savent tout ce qui se passe, tout ce qui se monte, quelles nouvelles halles se construisent. Leur travail est d'ouvrir les portes. J'entre en jeu au moment de la concrétisation.

– Geneva Palexpo réclame depuis plusieurs années la construction d'un centre de congrès. Soutenez-vous toujours cette demande?

– Il faut que le centre de congrès soit réalisé. Si nous ne le construisons pas, d'autres villes au niveau international le feront. Barcelone construit, par exemple. Où, quand, comment, qui paye, les questions demeurent ouvertes. Je doute que le Grand conseil soit prêt à mettre 150 millions. Une solution mixte semble aussi difficile après le traumatisme de la Praille.