Bâle II promet donc de pénaliser les clients considérés à plus haut risque, d'autant que l'accord coûtera dans certains cas cher aux banques en termes de fonds propres supplémentaires, estiment des spécialistes invités à un séminaire de PI Performance qui s'est déroulé mercredi à Genève et dont Le Temps s'est procuré les documents de travail.
«Les accords de Bâle II imposeront aux banques de supporter des coûts supplémentaires de 15% pour couvrir les riques opérationnels», explique Michel Maignan, responsable des risques à la Banque Cantonale de Genève (BCGE). Cette nouvelle catégorie de risque est la nouveauté de Bâle II. Pour compenser ces coûts, les nouvelles directives prévoient que les banques pourront consentir moins de fonds propres qu'auparavant pour couvrir les prêts, notamment hypothécaires. Ainsi, les prêts totalement garantis par des gages immobiliers ou des hypothèques sur des logements seront désormais pondérés à 35% au lieu de 50%. En d'autres termes, explique Alois Bischofberger, chef économiste de Credit Suisse, les banques économiseront 15% de fonds propres: une hypothèque d'un million de francs par exemple, donnera lieu à un dépôt de fonds propres par la banque de 28 000 francs, soit 8% de 350 000 francs pondérés en fonction du risque. «Par rapport à Bâle I, note l'économiste de Credit Suisse, 12 000 francs de moins sont exigés, soit une différence d'intérêt de 0,25% à 0,125%.» «La réduction de la couverture pour les hypothèques privées ne fera donc que compenser la consommation de fonds propres supplémentaires pour les risques opérationnels», précise Michel Maignan. Mais elle ne suffira pas totalement à la compenser. L'effet net du côté des banques sera une légère augmentation, estime Michel Maignan: «Au total, les banques consommeront probablement 2 à 5% de fonds propres en plus. Si l'on veut les rentabiliser, on devra relever d'autant les taux hypothécaires.» Et d'ajouter: «Le client aura intérêt à montrer vraiment sa capacité à la fois de fortune et de remboursement pour obtenir un meilleur rating et donc un meilleur taux.» Stephan Züger n'exclut pas non plus que le coût du crédit grimpe pour compenser l'utilisation plus élevée de fonds propres chez certaines banques.
Ce qui est sûr, c'est que «les banques vont pondérer bien davantage le risque avec l'entrée en vigueur de Bâle II», affirme Michel Maignan. Le client souhaitant accéder à la propriété se verra attribuer systématiquement un rating interne par les banques, c'est-à-dire une notation sur sa solvabilité et le risque qu'il représente pour la banque. Certaines le font déjà, à l'instar des grandes banques comme UBS et Credit Suisse, qui travaillent avec un système de rating individuel définissant un risque lié à la situation financière du client. Elles ne devraient donc pas connaître de grands changements. La banque Migros non plus, selon Stephan Züger: «En raison de notre politique de strict provisionnement par le passé et de notre portefeuille hypothécaire de qualité, nous n'avons pas eu les mêmes problèmes que certaines banques cantonales et nos taux ne devraient pas trop bouger.» Le leader des prêts hypothécaires en Suisse va en revanche affiner son système de notation des candidats à des prêts hypothécaires dès l'an prochain pour coller encore plus aux exigences de Bâle II.