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Au coeur des marchés. Récession de croissance

Le taux de croissance de 8,2% enregistré par l'économie américaine au

Le taux de croissance de 8,2% enregistré par l'économie américaine au troisième trimestre est fascinant. Non pas parce qu'il est de type chinois ou huit fois plus élevé que celui enregistré en Suisse pendant la même période, ou encore parce qu'on ne le reverra probablement plus avant très longtemps, mais parce qu'il a été obtenu avec des méthodes très classiques, presque déraisonnables. N'en déplaise aux gagne-petit adeptes de la rigueur, cette fois-ci, comme en 1983, la dernière fois où la croissance américaine était passée également de moins de 2% à plus de 8% en deux trimestres, c'est l'abandon de toute discipline budgétaire ou monétaire qui a produit le boom tant désiré. Mais aujourd'hui c'est l'approche presque homéopathique dans sa philosophie qui étonne, car en économie, soigner le mal par le mal, sans respecter les dosages, c'est un peu jouer au docteur Knock et privilégier la fuite en avant. Il n'empêche, en choisissant de relancer la croissance par le gonflement de la dette des consommateurs et par la création d'un effet richesse spectaculaire (hausse de la Bourse et de l'immobilier), les Etats-Unis ont réussi jusqu'à présent à réécrire la fable de La Fontaine. Sublimer les cigales pour entraîner le retour des fourmis, il faut avouer que le pari était osé. Néanmoins, l'été est maintenant passé et les cigales sans pleurer, semblent transmettre le témoin de la croissance aux fourmis. Non seulement les consommateurs américains n'ont pas craqué, mais les entreprises américaines remises d'aplomb ont repris leurs dépenses d'investissement et créent à nouveau des emplois, et plus important encore, les fourmis européennes et asiatiques ont abandonné leur frugalité. Ce nécessaire processus de passage du témoin de la croissance, des Etats-Unis vers le reste du monde, s'il semble bien parti et reste encore discret pour l'instant, ne peut souffrir d'une remise en question. Car pour corriger les gigantesques déséquilibres américains, véritable épine financière du système monétaire international, les rythmes de la croissance américaine et du reste du monde doivent pour le moins converger. L'Amérique qui consomme trop doit ralentir et le reste du monde qui épargne trop doit consommer. Dans ce contexte, l'ombre de 1984 n'est plus seulement furtive, et comme à l'époque, il ne fait aucun doute que l'on reparlera aux Etats-Unis l'année prochaine de «growth recession».