Affaire Blocher-BNS
Le Conseil fédéral publie un communiqué dans lequel il informe ne pas «douter de la validité des expertises faites» par le cabinet d’audit PricewaterhouseCoopers. Plus tôt dans la journée, la Banque nationale suisse (BNS) a également choisi la voie de la transparence en publiant une partie de son règlement interne et les conclusions du cabinet d’audit
Le Conseil fédéral sort de sa réserve. Dans un communiqué publié mercredi, il informe que la présidente de la Confédération a reçu des «informations de tiers concernant des activités boursières» de Philipp Hildebrand, «et plus précisément sur le marché des changes pendant l’année 2011».
Suite à ces informations, le Conseil fédéral, qui est l’autorité de nomination de la direction générale de la BNS, a décidé de confier à Kurt Grüber et Michel Huissoud, directeur et vice-directeur du Contrôle fédéral des finances, d’auditer l’ensemble des comptes du directeur de la BNS et de sa famille pour déterminer si des transactions pouvaient poser problème. «La révision n’a montré aucune opération susceptible de constituer une exploitation de la connaissance de faits confidentiels ou qui serait contraire aux règles de la BNS», poursuit le communiqué.
Le Conseil fédéral poursuit qu’il a «entendu, le 23 décembre 2011, Philipp Hildebrand et le président du Conseil de la BNS, Hansueli Raggenbass.» Il informe qu’il n’a «aucune raison de douter de la qualité des expertises faites». Et «renouvelle sa confiance à Philipp Hildebrand».
La BNS contre-attaque
Dans un communiqué publié mercredi après-midi, la Banque nationale suisse produit des documents (caviardés) concernant les soupçons pesant sur son président, Philipp Hildebrand. Elle affirme également que les dernières informations des médias sur les transactions de la famille Hildebrand sont partiellement incorrectes. Elles ne contiennent en outre aucun élément dont les organes de contrôle n’auraient pas eu connaissance, ajoute la BNS. Philipp Hildebrand prendra la parole jeudi 5 janvier.
Le réglement interne de la BNS fait quatre pages et tient en douze articles. On y apprend ce qui est interdit pour les membres de la direction élargie de la banque. Cela comprend notamment l’interdiction d’achat d’actions de banques.
Mercredi, le Tages-Anzeiger avait expliqué comment la famille Hildebrand aurait déjà procédé à des achats de dollars en 2011. Jeudi, la Weltwoche devrait publier des détails sur les transactions effectuées dans le courant de l’année 2011.
Des informations qui tombent au lendemain de la sortie du silence de deux acteurs de l’affaire «Hildebrand-Blocher». Mardi vers 21h15, la banque Sarasin a publié un communiqué de presse confirmant qu’un employé avait transmis des données bancaires à un avocat proche de l’Union démocratique du centre (UDC). Plus tard dans la soirée, dans une déclaration écrite envoyée à l’émission de la télévision alémanique 10 vor 10, la femme de Philipp Hildebrand, Kashya Hildebrand, soulignait avoir toujours suivi le marché des changes. Elle se disait «étonnée de l’intérêt suscité par cet achat de devises».
Résidence secondaire aux Grisons
Le Tages-Anzeiger, s’appuyant sur une personne dans l’entourage des Hildebrand, explique mercredi que le président de la BNS a déjà acheté des dollars au début de l’année 2011. Il s’agissait du produit de la vente de son chalet de vacances à Gstaad. La famille investit ses moyens liquides toujours en parts équitables en dollars et en francs, continue le quotidien zurichois.
En automne, la famille achète une nouvelle résidence secondaire dans les Grisons, plus proche de leur domicile zurichois. L’achat s’effectue, le 12 octobre, en dollars. Le montant (que l’on ne connaît pas) et le délai entre les transactions sont importants. Selon le règlement valant pour les affaires personnelles des membres du Directoire de la BNS, il faut que six mois au moins se soient écoulés entre l’achat et la vente. Un délai qui est respecté si l’achat de dollars du début de l’année a suffi à couvrir l’achat du chalet en octobre. Mais pas si les 512 000 dollars achetés par Kashya Hildebrand en août ont aussi dû être utilisés. Manifestement, les réviseurs engagés par le Conseil fédéral en décembre ont dû arriver à la conclusion que ce n’était pas le cas.
Le Tages-Anzeiger croit également savoir que les Hildebrand, pour démentir toute volonté de s’enrichir, ont versé à une œuvre de bienfaisance les gains réalisés par l’achat de dollars de Madame en août.
La Weltwoche promet des révélations
La «Weltwoche», proche de l’UDC, a fourni mercredi de nouvelles informations sur les délits d’initiés supposés de Philipp Hildebrand, président du directoire de la Banque nationale suisse (BNS). L’hebdomadaire avance les points suivants, dans l’ordre, en avance sur son édition à venir du 5 janvier (jeudi).
Le compte dont il est question est au nom de Philipp Hildebrand, et non pas à celui de sa femme Kashya Hildebrand. Les ordres d’achat ont été donnés par le président de la BNS lui-même, indique la Weltwoche. Philipp Hildebrand a réalisé plusieurs transactions entre mars et octobre 2011. Il s’agit par exemple pour mars d’achats de 1,1 million de dollars.
Le conseiller client de la banque Sarasin, qui avait conscience de violer le secret bancaire, s’est dénoncé lui-même. Il a également déposé plainte contre Philipp Hildebrand pour violation des règles de la Bourse suisse en rapport avec les délits d’initiés.
La banque Sarasin «s’excuse»
En outre, un employé du service informatique de la banque bâloise Sarasin a avoué mardi avoir remis à une tierce personne des documents liés à des transactions effectuées par la famille du président de la Banque nationale suisse (BNS) Philipp Hildebrand: «Un avocat lié de près à l’UDC», selon le communiqué.
Toujours selon les aveux de l’employé, cet avocat a ensuite organisé le 11 novembre dernier un rendez-vous avec Christoph Blocher, conseiller national et vice-président de l’UDC.
La banque bâloise a révélé les aveux de son employé mardi soir dans un communiqué. Ce dernier s’est présenté de lui-même le 1er janvier à la police cantonale zurichoise pour avouer sa forfaiture. Ses rapports de travail avec la Banque Sarasin ont été rompus avec effet immédiat.
Philipp Hildebrand a été informé de cette affaire par la banque Sarasin laquelle, dans son communiqué, dit «regretter extrêmement» cet incident. Elle lui présente ses excuses pour le préjudice causé en matière de non-respect du principe de la confidentialité des données.
L’établissement bancaire privé bâlois condamne également avec fermeté ce qu’il qualifie «de détournement de données confidentielles dans un but politique». Enfin, la banque se réserve le droit d’entreprendre une action en justice dans cette affaire.
Kashya Hildebrand et le taux «ridiculement bas»
L’épouse du président de la Banque nationale suisse (BNS), Kashya Hildebrand, s’est également expliquée pour la première fois publiquement mardi soir sur ses transactions sur devises menées en août dernier.
Cette ancienne trader tient aujourd’hui une galerie d’art à Zurich. Dans une déclaration écrite envoyée mardi à l’émission 10 vor 10 de la télévision alémanique SF, elle souligne avoir toujours suivi les marchés des changes et avoir voulu profiter du niveau «ridiculement bas» du dollar («lächerlich billig»).
Elle se déclare «très étonnée de l’intérêt suscité par cet achat de devises» en août dernier. Cette transaction a été signalée le lendemain à la BNS, «afin que règne la transparence, et il n’y a pas eu d’objection à cette transaction».
Kashya Hildebrand a justifié son achat de dollars car «70 à 80% des transactions financières de sa galerie se font en dollars». Elle n’a donné aucune indication sur le montant de l’achat. Selon des médias, il s’agirait de 500 000 dollars.
Selon l’épouse du président de la BNS, le plus important dans cette affaire est le vol de documents bancaires de la famille Hildebrand «afin de déstabiliser la Banque nationale suisse».