Le conflit déclaré avec la Chine, qui casse les prix des panneaux photovoltaïques et provoque indirectement la faillite d’entreprises aux Etats-Unis, en Allemagne et en Suisse, ne ralentit pas le rythme d’installation du solaire dans plusieurs pays européens. C’est l’une des conclusions d’une étude de la Banque Sarasin sur les énergies renouvelables, publiée lundi.

En 2011, la moitié de la nouvelle capacité photovoltaïque installée dans le monde l’a été en Italie (9,3 gigawatts ou GW) et en Allemagne (7,5 GW). La Chine occupe la troisième position avec 2,5 GW, sur un total de 30,3 GW. Cette tendance va s’inverser à la suite de la forte réduction des subventions dans plusieurs pays européens. Globalement, cependant, l’essor de la production d’énergie solaire est assuré, car la faible croissance européenne sera largement compensée par l’explosion des marchés chinois, américain, brésilien ou indien. Les auteurs de l’étude, dont Matthias Fawer, prévoient une croissance moyenne annuelle négative en Europe d’ici à 2016 (–3%), mais un fort engouement pour le solaire aux Etats-Unis (+54%), au Brésil (+213%), en Chine (+31%) ou en Inde (+64%).

L’an dernier, l’Allemagne a installé trois fois plus de panneaux photovoltaïques que la Chine, mais la parité sera déjà atteinte en 2013, et en 2016 la Chine mettra en service le double de capacité solaire comparé à l’Allemagne. En y regardant de plus près, on constate que l’avenir de la situation en Europe est contrasté. Plusieurs pays vont s’équiper et suivre l’exemple de l’Italie et de l’Allemagne. La Suisse, avec une progression moyenne annuelle attendue de 38% jusqu’en 2016, en fait partie. Tout comme l’Espagne (+24%), la Turquie (+199%) ou le Portugal (+97%).

Si l’équipement progresse, ce n’est pas le cas de la santé financière des fabricants de panneaux. Durant les neuf premiers mois de cette année, les prix des modules photovoltaïques ont de nouveau chuté de 15%, mettant à mal, même en Chine, les marges bénéficiaires dans un contexte de surcapacité de production. Le taux d’utilisation de l’outil industriel varie entre 50 et 80%. Les auteurs de l’étude s’attendent à une poursuite de la consolidation du marché, alors que les coûts de production des panneaux chinois sont inférieurs de 25% à ceux fabriqués aux Etats-Unis ou en Europe. En 2015, 40% des 300 producteurs actuels auront disparu par faillite ou absorption par un concurrent. «La Suisse ne peut pas être compétitive dans le domaine de la fabrication, explique Matthias Fawer. En revanche, un gros potentiel commercial existe dans le domaine des installations et du bâtiment.» L’Office fédéral de l’énergie s’inquiète, d’ailleurs, de la pénurie de personnel qualifié et du manque de formation dans ce domaine.

Les énergies renouvelables se portent bien. Sur les 208 GW de production d’électricité installés en 2011, plus de la moitié (116 GW) provient de sources renouvelables. La capacité totale installée dans le monde produit 6300 milliards de kWh, soit plus du double des 439 centrales nucléaires en service. En 2011, la capacité de production des nouvelles énergies renouvelables a progressé de près de 30%, et devrait augmenter de 23% cette année. L’éolien reste en tête (284 GW), suivi du solaire (103 GW) et de la biomasse (85 GW). Dans l’éolien, la part de l’Europe a fortement chuté en 2011, en passant de 51 à 25%, alors que celle de l’Asie, poussée par la Chine, atteint 52%.

La Suisse est bien placée, avec la technique du pompage turbinage, pour tirer parti de la complémentarité entre énergie éolienne et barrages. Cela permet de créer un système de stockage efficace à moindre coût, constatent les auteurs de l’étude. Alors qu’en Allemagne, la répartition idéale est de 75% d’éolien et 25% de solaire, la Suisse devrait viser 70% de solaire et 30% d’éolien et de biomasse pour remplacer la part de 40% d’énergie nucléaire. Les analystes de la Banque Sarasin estiment également qu’en 2020, sans subventions, l’investissement dans le solaire sera aussi rentable que l’éolien terrestre actuellement.

La capacité de production d’énergie éolienne se déplace rapidement vers l’Asie