L'annonce, repérée en ce début de semaine par des sites spécialisés, était quasiment passée inaperçue. Depuis vendredi, Amazon est pourtant passé à l'offensive en Suisse, en annonçant la gratuité des frais de livraison pour les commandes d'une valeur supérieure à 49 euros, soit 53,40 francs. Cette nouvelle fait partie d'une offensive beaucoup plus large en Suisse, estiment les sociétés helvétiques actives dans la vente en ligne, qui craignent qu'Amazon ne décuple, à terme, ses vente dans le pays.

Dans le détail, Amazon offre ces frais de ports pour les commandes effectuées via ses sites amazon.fr, amazon.de et amazon.it – le groupe ne possède pas de site web suisse. L'expédition gratuite concerne «des millions d'articles», affirme Amazon, répartis en vingt-cinq catégories telles que Mode, Bijoux et Montres, Électronique, Informatique, Maison et Jardin, ou Jouets et Bébé. Cette promotion doit durer six mois. Amazon rappelle dans son communiqué que les frais de port dont déjà offerts pour les produits culturels éligibles expédiés par Amazon, tels que DVD et CD, pour toute commande d’au moins 25 euros (27,20 francs) et passée sur le site Amazon.fr.

Jusqu'ici, 16 euros de frais

L'économie qui pourra être réalisée par les consommateurs pourra être substantielle. Ainsi, jusqu'à présent, une commande d'une valeur de 88,5 d'euros renchérissait de seize euros pour des frais de port. «Notre objectif est de proposer la meilleure expérience d’achat possible à nos clients», affirmait Xavier Garambois, vice-président d'Amazon Retail en Europe. Contactée pour des compléments d'information, la multinationale n'a pas répondu à nos questions.

Cette annonce est prise très au sérieux par les sociétés suisses actives dans la vente en ligne. «En supprimant les frais de port pour ces commandes, Amazon va devenir plus attractif. De manière générale, nous avons constaté ces derniers mois que le groupe était passé résolument à l'attaque en Suisse, en augmentant considérablement l'assortiment disponible», estime Patrick Kessler, président de l'Association Suisse de Vente à Distance. Celle-ci regroupe 200 membres, dont Nespresso, Zalando, Ex Libris, Manor, FashionFriends et MediaMarkt. «Amazon livre maintenant des vêtements et des appareils électroniques. Et certains de leurs prix, pour des produits de Nike ou Adidas, sont  pour les consommateurs en Suisse même moins chers qu'en Allemagne», constate Patrick Kessler.

Amazon en Suisse: entre 300 et 350 millions de francs?

Selon le spécialiste, la croissance d'Amazon pourrait devenir exponentielle en Suisse: «Nous estimons, actuellement, son chiffre d'affaires dans le pays entre 300 et 350 millions de francs. En comparant avec le développement d'Amazon en Allemagne à long terme, ce chiffre d'affaires pourrait être multiplié par dix si la société continue à être agressive». Du coup, les acteurs suisses du e-commerce auront de la peine à tenir le choc. «Ils peuvent se battre sur le service, avec du personnel qui répond immédiatement au téléphone en suisse allemand, par exemple. Ou en étant actif sur des marchés de niche. Mais rivaliser sur les prix sera très difficile», poursuit Patrick Kessler. A noter que Swisscom et Coop doivent lancer, en 2016, la plateforme Siroop, destinée à aider les vendeurs en ligne suisse.

Les concurrents d'Amazon pourront se consoler grâce aux frais annexes que facture la multinationale. Si l'on reprend notre exemple d'une commande valant 88,5 euros, la ligne «Acompte Frais d'Import» la renchérissait de 12,8 euros. Cette ligne comprend les frais de dédouanement (imputés par le transporteur), les frais de douane et la TVA. Pour faire baisser ces tarifs, il existe une astuce: faire en sorte que la valeur de commande ne dépasse pas 5 francs de TVA suisse, soit 200 francs pour une commande de livres et 62,50 francs pour les autres articles. Toutefois, cette astuce pourrait ne plus tenir longtemps, le Conseil national ayant décidé cet automne que toutes les commandes sur Internet devraient être taxées.

L'hypothèse d'une structure en Suisse

Amazon pourrait aller plus loin encore pour baisser l'ensemble des taxes. «Il est tout à fait possible que la société crée en Suisse une structure traitant de manière centralisée toutes les commandes pour le pays, ce qui réduira certaines taxes», estime Patrick Kessler.

Ce ne serait pas la première fois qu'Amazon constitue une structure dans le pays. Il y a une dizaine de jours, l'hebdomadaire HandelsZeitung révélait que la division Amazon Web Services (AWS) avait créé une société à Zurich, inscrite au registre du commerce. AMS est le numéro un mondial de l'informatique en nuage («cloud computing»), le stockage de données à distance. Le détail de ses activités en Suisse n'a pas été révélé.


Le site de vente en ligne a ouvert sa première librairie physique à Seattle

Amazon a ouvert mardi sa première librairie physique, à Seattle, dans l’Etat de Washington. La sélection des livres proposés à la vente est établie en fonction des avis des lecteurs et des commandes sur le site Amazon.com. Les prix sont identiques à ceux proposés sur le site, précise Amazon. La librairie de Seattle, située dans le quartier d’University Village, sera ouverte tous les jours sauf pour Thanksgiving et Noël. Les clients pourront y choisir des livres mais aussi y tester les liseuses et les tablettes numériques proposées par Amazon.

Selon le Seattle Times, entre 5 000 et 6 000 références seront disponibles dans la librairie d’Amazon, loin des millions de titres disponibles sur le site Internet. Le prix, lui, sera identique.
Par ailleurs, Alphabet, maison mère de Google, a annoncé mardi vouloir commencer la livraison de colis par drones en 2017. «Notre but est d’avoir un service commercial en activité en 2017», a déclaré David Vos, responsable de ce projet, baptisé Project Wing, lors d’une convention sur le trafic aérien. Plusieurs entreprises, dont Amazon, planchent sur la livraison de colis au moyen de drones. Alphabet dispose d’un prototype qui a volé l’an dernier en Australie. Les livraisons par drones ne pourront cependant pas devenir réalité avant la publication, début 2016, des règles de l’agence fédérale américaine de l’aviation civile régissant les vols commerciaux de drones à une altitude inférieurs à 500 pieds (152 mètres). LT