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La firme de Cupertino a lancé un grand casting pour «Planet of the Apps», un programme de téléréalité qui suivra au jour le jour des développeurs d’applications. La Silicon Valley et Hollywood se demandent s’il s’agit d’un coup marketing ou si Apple a enfin décidé de produire du contenu

Les développeurs d’applications rêvant d’une opportunité doivent frémir d’excitation. Apple s’apprête à raconter l’histoire d’une poignée d’entre eux dans «Planet of the Apps» (jeu de mot avec Planet of the apes, le titre anglais de La Planète des singes). Un grand casting national a été annoncé mi-juillet. Il se tiendra à San Francisco, à Los Angeles, à New York et à Austin cet automne. Les candidatures doivent être envoyées avant le 26 août, accompagnées d’une vidéo de présentation d’une minute et la garantie que la version beta fonctionnera dès octobre sur iOS, macOS, tvOS ou watchOS.
Pour monter un projet qui sort de son domaine d’expertise, Apple a fait appel à Propagate, la société fondée par Ben Silver, producteur de The Biggest loser (sur des candidats essayant de perdre du poids) et Howard T. Owens, passé par Masterchef Junior. «Planet of the Apps donnera aux développeurs la chance de percer et de partager leurs idées avec le monde», promet l’annonce. Les finalistes rencontreront des capital-risqueurs prêts à investir dix millions de dollars et leur bébé aura une place de choix sur l’App Store. Le tournage doit commencer fin 2016 mais rien n’a été dit sur le format exact, la date et surtout le support de diffusion.
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La nouvelle n’a pas nécessairement suscité un enthousiasme délirant. Ne serait-ce que parce qu’il existe déjà une série sur le même thème: Silicon Valley, la sitcom de HBO. Le site spécialisé VentureBeat, qui signale au passage que Planet of the Apps est le nom d’une start-up israélienne, assure que «le fantôme de Steve Jobs en pleure». Le «Washington Post» s’interroge de son côté sur l’intérêt réel pour les candidats. La téléréalité anglée sur le business est devenue un genre en soi aux Etats-Unis (Shark Tank, The Apprentice, Hell’s Kitchen…) sans résultats probants pour les participants.
Au-delà de la pertinence du programme, c’est surtout la stratégie d’Apple qui fait parler dans la Silicon Valley et 600 kilomètres plus au sud, à Hollywood. Où sera diffusé Planet of the Apps? Sur une chaîne partenaire? En exclusivité sur Apple TV? Sur un site de streaming rival de Netflix, Hulu ou Amazon Prime? Plus important encore: Apple, qui s’est toujours concentré sur la construction d’appareils, envisage-t-elle d’élargir son champ d’action?
Le géant de l’électronique a déjà produit un documentaire sur la tournée de la pop star Taylor Swift. Il financerait également la série Vital Signs du rappeur Dr Dre (à qui Apple a racheté Beats Electronics 3 milliards de dollars) actuellement en tournage à Los Angeles. Mais Planet of the Apps sera le premier programme original sans lien avec la musique et peut-être le début d’une nouvelle ère à Cupertino.
Les précédents Amazon et Netflix
Dans une interview récente au «Hollywood Reporter», Eddy Cue, le monsieur contenus d’Apple, a affirmé que «nous ne sommes pas dans l’optique d’essayer de créer des séries télévisées. Nous n’essayons pas de concurrencer Netflix ou de concurrencer Comcast». L’industrie a du mal à s’en convaincre. Surtout depuis que le magazine «Fast Company» a révélé qu’Apple avait reçu discrètement plusieurs artistes à Sundance lors du célèbre festival du cinéma indépendant.
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Le milieu de l’entertainment attend depuis des années qu’Apple franchisse le pas. La rumeur d’un rachat de studio de cinéma (la Warner Bros?) refait surface régulièrement. Tim Cook et ses équipes ont forcément remarqué comment leurs voisins de la Silicon Valley, Amazon et Netflix, avaient mis la main sur Hollywood en créant leurs propres contenus (Transparent, House of Cards…)
Rien que le prestige d’Apple aurait de quoi séduire tous les membres de la «A-list» de l’industrie. Et si cela ne suffisait pas, la marque à la pomme dispose d’une arme fatale: tous les producteurs de Los Angeles et d’ailleurs font la cour à Netflix, éblouis par son trésor de guerre de 6 milliards de dollars. Celui d’Apple s’élèverait à 200 milliards de dollars…