Technologie
Facebook et Microsoft parient sur les chatbots pour succéder à l’écosystème des apps qui commence à montrer des signes d’essoufflement. Mais ces programmes d’intelligence artificielle ont encore du chemin à faire

1,5 million d’apps disponibles sur iOS, 1,6 million sur Android. Le consommateur finit par se perdre alors que les développeurs ont de plus en plus de mal à faire connaître un produit qui leur coûte cher. Selon la société Adparlor, il faut désormais en moyenne dépenser 4,73 dollars pour attirer un utilisateur. Le marché qui a changé la face de l’industrie du téléphone mobile et Internet flirte avec la saturation. Alors les investisseurs de la Silicon Valley sont de plus en plus nombreux à voir dans les bots la nouvelle poule aux œufs d’or de l’high-tech.
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Satya Nadella, le directeur de Microsoft, a promis une révolution quelques semaines avant que Facebook ne lance sa plateforme de bots sur Messenger, sorte d’appstore nouvelle génération. «Il y a une bonne raison pour laquelle Microsoft et Facebook poussent les bots au détriment des apps», explique au Temps Thomas Husson, consultant chez Forrester. «Les deux sociétés ont raté le virage des OS mobiles et du marché des apps stores.»
Des milliards de ventes
Pour Richard Windsor, de la société Edison Investment Research, Facebook peut doubler ses revenus en cinq ans si elle parvient à monter un écosystème efficace. De son côté, le cabinet Gartner estime qu’en 2016, deux milliards de dollars de vente en ligne auront été réalisés grâce à ces assistants virtuels.
Spécialisé dans l’analyse publicitaire, ComScore assure que le temps passé sur un smartphone se concentre à 80% sur trois apps seulement. Parmi les plus populaires, les messageries, Messenger (800 millions d’utilisateurs) et WhatsApp (1 milliard) en tête. Celles qui sont justement parfaitement adaptées au fonctionnement des bots.
Apple, plus ouvert?
Mais les stars de la Silicon Valley comme AirBnB continuent d’être valorisées à plusieurs milliards de dollars quand Tracxn chiffre à 140 millions de dollars les sommes investies dans les chatbots depuis 2010. «Il sera intéressant de voir si Apple montre des signes d’ouverture aux développeurs de chatbots l’année prochaine», analyse Thomas Husson. «Ce sera un signe que la technologie devient plus mature.»
Jessica Ekholm de Gartner partage ses réserves. A ses yeux, il est plus question d’évolution que de révolution. «Il y a une hype, c’est certain, mais les bots ne sont pas près de remplacer les apps. Leur accès est encore trop limité et les utilisateurs ne sont pas familiers avec le système», dit-elle. Operator, Assist, Howdy ou x.ai, quelques grands noms du secteur, restent inconnus du grand public.
«L’expérience n’est pas très humaine pour le moment», ajoute Jessica Ekholm. «Or on sait que l’expérience du consommateur doit être bonne pour qu’il réutilise le service», conclut la consultante.
Les assistants vocaux passent un cap
Si les bots par messageries sont la tendance du moment dans la Silicon Valley, les assistants vocaux continuent leur bonhomme de chemin. Apple promet que son iOS10 qui devrait sortir dans les jours prochains rapprochera un peu plus Siri de HAL, l’ordinateur omnipotent de 2001, l’Odysée de l’espace. La firme de Cupertino a ouvert Siri aux développeurs tiers et un utilisateur d’Iphone pourra désormais s’en servir pour dicter ses messages WhatsApp, chercher des photos sur Pinterest ou encore commander un Uber.
Par le passé, Siri a déçu les espoirs des consommateurs qui ont fini par s’en détourner. Apple espère que ces améliorations éviteront l’effet de lassitude. C’est qu’elle n’est pas la seule sur le marché. Microsoft a Cortana, 20% des recherches sur Google se font vocalement et Amazon négocie avec Lenovo, le plus gros vendeur d’ordinateurs au monde, pour y intégrer son Alexa (disponible sur Echo, en anglais uniquement pour le moment). Les quatre géants seront bientôt rejoints par Viv, une «interface pour tout», présentée par Dag Kittlaus, le cofondateur de Siri (racheté 200 millions de dollars par Apple en 2010) en mai dernier. Selon le cabinet Tractica, 504 millions de personnes dans le monde utilisent un assistant vocal aujourd’hui. Le total frôlera les deux milliards en 2021.