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Chez V-Zug, où mijote la cuisine de demain

Pour le leader suisse de l’électroménager haut de gamme, les appareils domestiques du futur s’annoncent ultra-connectés, personnalisés, avec reconnaissance vocale et livre de recettes modulable

L'usine V-Zug.  — © René Ruis
L'usine V-Zug.  — © René Ruis

Des brosses à dents aux cuisinières en passant par les claviers d’ordinateurs, de nouveaux objets de la vie quotidienne sont chaque jour pensés en Suisse. «Le Temps» est allé visiter ces centres de recherches

D’un pas vif, Stephan Keller déambule entre les monte-charges, distribue des bonjours à la volée. A Zoug, dans l’un des immenses hangars de l’usine V-Zug, machines à laver, cuisinières ou encore réfrigérateurs s’accumulent en pièces détachées, dans un amoncellement de carton et cellophane. Un peu plus loin, dans l’aile droite du site de 6,75 hectares, une plaque à induction encore à l’état de prototype subit un test de haute température.

Lire aussi notre éditorial:  L’aptitude à l’innovation, label suisse

Leader de l’électroménager haut de gamme en Suisse, V-Zug mise sur le futur. C’est ce qui obnubile Stephan Keller, depuis qu’il a pris la tête du département recherche et innovation de l’entreprise il y a quatre ans. Une ruche sans cesse en mouvement où quelque 180 employés imaginent et conçoivent l’électroménager de demain. Ils sont ingénieurs, informaticiens, mathématiciens, designers, spécialistes des matériaux ou encore experts culinaires.

Fondue et raclette

Des cuisines en inox au design épuré, des buanderies où les placards distillent automatiquement une brume rafraîchissante aux costumes-cravates: les pubs télévisées V-Zug font rêver. L’ensemble respire la précision – forcément millimétrée – à la suisse. Fleuron de l’industrie helvétique, l’entreprise inventait, en 2001 déjà, un lave-vaisselle spécialement conçu pour les appareils à fondue et à raclette.

© René Ruis pour Le Temps
© René Ruis pour Le Temps

En 2017, V-Zug a engrangé un chiffre d’affaires d’environ 600 millions de francs, soit une croissance légèrement inférieure à 2,5%. La société n’est pas cotée en bourse, contrairement au groupe auquel elle appartient (Metall Zug SA). Un élément qui «a offert un cadre de développement idéal pour la compagnie», dit Stephan Keller. Alors que l’entreprise emploie aujourd’hui 1400 collaborateurs en Suisse, le V de «Verzinkerei», galvanisation en français, témoigne d’une époque révolue où les ouvriers recouvraient les pièces en métal d’une couche de zinc pour les protéger de l’oxydation.

Produits virtuels

A quoi ressemblera la cuisine du futur? Dans son bureau plutôt «old fashion», Stephan Keller laisse voguer son imagination: un espace ultra-connecté, hautement personnalisé, avec diverses assistances, de la reconnaissance vocale aux programmes automatiques. Puis il réfléchit à voix haute. «Le client se demande: «Que puis-je cuisiner avec ce que j’ai dans mon frigo?», il veut des recettes qui s’adaptent. Lorsqu’il a les mains prises, il veut un four qui s’ouvre sur demande, qui enclenche à distance le programme gril ou vapeur.»

© René Ruis pour Le Temps
© René Ruis pour Le Temps

En matière d’innovation, le credo de V-Zug pourrait donc se résumer ainsi: à partir d’un produit, développer des services, une série de produits virtuels. Mais comment obtenir l'intelligence artificielle nécessaire à la conception des applications et autres programmes? «En tant que petite entreprise, nous n’avons pas les moyens d’avoir un département entier dédié à l’intelligence artificielle, contrairement à Google ou Apple, reconnaît le dynamique quadragénaire. Il nous faut aller chercher ce savoir ailleurs, collaborer avec les meilleurs spécialistes du domaine.» Accumuler les pièces de savoir pour créer un produit de pointe: la Suisse doit, selon lui, jouer cette carte. Dans cette optique, V-Zug a récemment conclu un partenariat avec la société IBM.

Un «petit robot»

Au cœur du département recherche et innovation, les appareils les plus fous sont élaborés en secret. A travers les vitres, on distingue des têtes penchées sur des plans, le bruissement ténu des claviers. Dans une pièce encombrée de casseroles et de poêles, un appareil encore à l’étude pourrait un jour être capable d’offrir tout à la fois une cuisson optimale au four, au gril ou encore à la vapeur, sans aucune intervention humaine. Sur un four équipé d’une plaque à induction, plus de bouton, l’écran de contrôle est entièrement lisse, tactile. Un vrai «petit robot», lance Stephan Keller, fasciné, en effleurant la surface du bout des doigts.

© René Ruis
© René Ruis

Pour anticiper les besoins des clients, encore faut-il connaître leur profil. «Certains recherchent la simplicité avant le design, d’autres, moins nombreux, sont friands de produits sophistiqués et prêtent attention aux moindres détails», commente Stephan Keller. Selon lui, l’électroménager est en passe de remplacer la voiture comme symbole de réussite sociale dans certains pays. En Chine, par exemple, il arrive que les ménages aient deux cuisines, l’une où l’on prépare le repas, et l’autre, que l’on exhibe aux invités. «Sur le marché suisse, le client recherche avant tout un produit de bonne qualité, avec beaucoup de fonctionnalités et un usage facile, précise-t-il. J’appelle ça le compromis pragmatique.» Si V-Zug utilise différents matériaux, acier, carbone, inox, verre, bois, plastique ou encore émail, il arrive que certains clients formulent des demandes un peu particulières: des éléments en or, par exemple.

Marché chinois en plein essor

Aujourd’hui, 90% des produits fabriqués par la marque sont encore destinés au marché suisse, mais les exportations vers les États-Unis, la Chine ou la Russie ne cessent de croître. «La Suisse, comme l’Allemagne, jouit d’une aura exceptionnelle en Chine, où elle évoque pêle-mêle: industrie de pointe, exclusivité, luxe, avance Stephan Keller. Nous exploitons pleinement ces stéréotypes, pour vanter la perfection suisse à la maison.» La preuve, V-Zug va bientôt lancer une application mobile de recettes avec une fonction commande intégrée, spécialement pour le marché chinois.

En moyenne, l’entreprise commercialise cinq ou sept nouveautés chaque année et un produit «révolutionnaire» tous les dix ans. Dernier en date: le Refresh Butler, qui rafraîchit les textiles délicats grâce à la photocatalyse (vapeur et pompe à chaleur). A chaque nouveauté, un même impératif à tenir: à mesure que l’objet se complexifie, acquiert de nouvelles fonctionnalités, l’utilisation, elle, doit demeurer la plus simple possible. Avant d’être lancé sur le marché, chaque appareil passe près de 600 tests. La garantie de la qualité suisse.