C’était une décision extrêmement attendue, et depuis des semaines. Mercredi, la «cour suprême» de Facebook a tranché: Donald Trump doit bien être banni de Facebook. Mais attention, l'ancien président pourrait y revenir. Toutefois, il n’était pas approprié pour Facebook d’imposer de sanction indéterminée, car il n’existait pas de norme de suspension indéfinie, selon le conseil de surveillance.

Ce dernier demande désormais que le réseau social «examine cette affaire afin de déterminer et de justifier une réponse proportionnée et cohérente avec les règles appliquées aux autres utilisateurs de sa plateforme». Le conseil de surveillance exige ainsi de Facebook qu'il achève cet examen dans un délai de six mois. Au réseau social de créer des politiques claires qui concilient sécurité publique et liberté d'expression. La plateforme a immédiatement écrit, sur son blog officiel, qu'elle allait «examiner la décision du conseil et préparer une action claire et proportionnée».

Demande datant de janvier

En attendant, le compte de Donald Trump demeure suspendu sur Facebook (où il comptait 35 millions d'abonnés), comme sur sa filiale Instagram (24 millions d'abonnés). Mais il n'est pas impossible que l'ancien président soit à nouveau autorisé à utiliser ses comptes, après avoir purgé une peine d'une durée déterminée.

Ce verdict était attendu depuis le 22 janvier. Ce jour-là, Mark Zuckerberg, directeur de Facebook, avait demandé à son conseil de surveillance de trancher: était-il juste de décider de bannir, le 7 janvier, l’ancien président de la plateforme? Le lendemain de l’assaut du Capitole, le réseau social l’avait banni pour une durée indéterminée. Ne pouvant assumer lui-même cette décision, Mark Zuckerberg l’avait sous-traitée.

Effets importants

C’est donc le conseil de surveillance qui a tranché. «Au moment de la publication des messages de Donald Trump, il y avait un risque clair et immédiat de préjudice et ses paroles de soutien aux personnes impliquées dans les émeutes ont légitimé leurs actions violentes», a écrit le conseil.

Cet organe est financé à hauteur de 130 millions de francs sur six ans par le réseau social, mais il est indépendant. Il est composé de 20 membres (journalistes, avocats, défenseurs des droits humains, anciens dirigeants politiques) et ses décisions sont contraignantes. Ce conseil peut se saisir lui-même de questions, sur suggestion d’internautes, ou répondre à des requêtes directes de Facebook.

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Cette décision aura des effets qui dépasseront Facebook. Sur Twitter (où il comptait 88 millions d’abonnés), le sort de Donald Trump avait été scellé début janvier, avec un bannissement à vie, sans voie de recours. Une décision pas facile à prendre pour le directeur de Twitter, Jack Dorsey, qui déclarait: «Cela établit un précédent qui me semble dangereux: le pouvoir qu’un individu ou une entreprise ont sur une partie de la conversation publique mondiale.» Par contre, Donald Trump a toujours l’espoir de réapparaître sur YouTube. Son propriétaire, Google, avait affirmé attendre que «le risque de violence diminue» avant d’autoriser l’ancien président à publier à nouveau des vidéos sur sa chaîne.

Nouveau site

Donald Trump s’était fait discret ces dernières semaines sur le web. Il est certes suivi par 2 millions de personnes sur le réseau social Gab, continuant d’affirmer que sa défaite est le résultat d’un vote truqué, mais sans écho important en dehors de cette plateforme. L’ancien président a lancé dans la nuit de mardi à mercredi son propre site, intitulé «Depuis le bureau de Donald J. Trump», publiant régulièrement de courts messages. L’ancien locataire de la Maison-Blanche y critique Twitter, se moque des républicains et des démocrates et contestait encore le 3 mai le résultat de l’élection présidentielle. Mercredi, il a de nouveau publié un message évoquant une élection truquée.

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Il est possible de partager ces messages – via Facebook et Twitter – et de les «liker», mais aucun compteur de ces petits cœurs ne s’affiche. Impossible, donc, de mesurer son audience pour l’heure. Conseiller de Donald Trump, Jason Miller avait affirmé en mars qu’un nouveau réseau social serait lancé – «ce sera quelque chose de gros», disait-il. Mercredi, Jason Miller précisait, sur Twitter, que le nouveau site web n’était pas le réseau social précédemment annoncé.