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Le réseau social a fermé son incubateur à idées chargé de concevoir de nouvelles applications mobiles. Il est notamment victime de sa mauvaise image de marque

Avec Slingshot, Facebook rêvait de concurrencer Snapchat, le populaire service qui permet d’envoyer des photos et des vidéos qui disparaissent au bout de quelques secondes. Mais seulement un an et demi après son lancement, cette application va disparaître. Deux autres programmes sont dans le même cas de figure: Rooms, une plateforme de messagerie de groupe, et Riff, un service de partage de vidéos.
Ces échecs ne sont pas les premiers. Bien au contraire: ils sont devenus la norme pour le réseau social. «C’est une tendance qui dure depuis plusieurs années, note Brian Blau, analyste au sein du cabinet Gartner. Quasiment aucune des applications annexes lancées par Facebook n’a trouvé son public. Et beaucoup n’existent plus.» Les plus gros flops s’appellent Home, une interface pour le système mobile Android, Paper, un journal personnalisé, ou encore Camera, un rival d’Instagram – que Facebook a finalement préféré racheter.
Objectif: atteindre 1,5 milliard de membres
Entérinant ces revers à répétition, la société de Menlo Park a pris une autre décision radicale: la fermeture du Creative Labs, un incubateur à idées lancé il y a deux ans. Ces équipes d’ingénieurs travaillaient jusqu’à présent sur la conception de nouvelles applications mobiles. Cela devait constituer la deuxième étape de la stratégie «mobile first» décrétée à l’été 2012 par Mark Zuckerberg, le cofondateur et patron de Facebook. Objectif: étendre l’emprise du réseau social, qui compte déjà plus de 1,5 milliard de membres dans le monde.
«Facebook ne souhaite pas être seulement dépendant de son application principale ou de ses acquisitions, estime Brian Blau. Ils veulent se diversifier, un peu à la manière de Google. Pour cela, ils n’ont pas d’autre choix que de continuer à essayer.» Une porte-parole de la société précise d’ailleurs que de nouveaux services mobiles seront développés en interne. Début novembre, deux applications ont été lancées. Facebook tente aussi de percer dans les contenus, notamment avec le lancement récent d’Instant Articles, un nouveau format de lecture d’articles de presse sur smartphone.
Réputation malmenée
La multiplication des échecs sur les supports mobiles peut s’expliquer par la réputation de Facebook auprès de ses utilisateurs. En raison de multiples polémiques, principalement dans le domaine de la vie privée, le réseau social «n’est pas perçu comme étant ouvert, transparent et authentique», note Brad Hecht, directeur de recherche chez Reputation Institute. Dans le dernier baromètre annuel établi par ce cabinet de conseil, Facebook ne se classe ainsi qu’au 40e rang des entreprises high-tech bénéficiant de la meilleure image de marque.
Ces derniers mois, la société a ainsi soigneusement évité d’insérer le mot Facebook dans le nom de ces nouvelles applications. «Il y a des milliers d’applications disponibles sur les boutiques mobiles. Très peu rencontrent le succès», nuance Brian Blau. Pour l’analyste, le réseau social n’aurait tout simplement pas encore trouvé l’innovation capable de séduire les utilisateurs de smartphone. «Pour Facebook, l’échelle n’est pas la même que pour une start-up. Un succès se mesure en plusieurs dizaines voire centaines de millions d’adeptes», ajoute-t-il.
Malgré ces difficultés, l’entreprise reste l’acteur dominant sur les supports mobiles. Aux Etats-Unis, 75% des possesseurs de smartphone lancent l’application Facebook au moins une fois par mois, selon les estimations du cabinet ComScore. 60% se servent de la messagerie maison Messenger. Et l’application «rivale» WhatsApp, rachetée l’an passé par l’entreprise pour 19 milliards de dollars, se rapproche de la barre du milliard d’utilisateurs dans le monde.