Technologie
L’Allemagne s’est dotée cette semaine de règles éthiques pour le comportement des véhicules autonomes. La Suisse n’a pas encore franchi cette étape

Une voiture autonome circule dans un quartier résidentiel. Soudain, ses capteurs détectent qu’un motard circule à vive allure en direction du véhicule. Une collision semble inévitable, à moins que la voiture autonome ne braque vers la droite et heurte une mère avec ses deux enfants. Quel doit être le choix opéré par les logiciels du véhicule? Heurter le motard (dont le casque lui sauvera peut-être la vie) ou heurter la mère et ses deux enfants (qui seront peut-être en partie protégés par le bord du trottoir)?
Ces questions, davantage éthiques que technologiques, commencent à intéresser les autorités. Cette semaine, le ministre allemand des Transports, Alexander Dobrindt, a présenté les recommandations émises par un comité d’éthique sur les voitures autonomes. Berlin va inscrire dans ses lois ces avis, contenus dans un document de 36 pages. Le ministre a affirmé que «la commission d’éthique a fait œuvre de pionnier et a développé les premières recommandations au monde pour la conduite autonome. Nous allons maintenant les mettre en œuvre.»
Privilégier le conducteur ou le piéton?
Dans les grandes lignes, ce document indique que la préservation de la vie humaine doit toujours avoir la priorité sur la vie animale (un chevreuil qui traverse la route, par exemple) et les objets. Autre point: toutes les vies humaines ont la même valeur. La voiture, en cas de choc qui semble inévitable, ne devra pas privilégier la vie d’un bébé par rapport à celle d’une personne âgée. Ou celle d’un homme plutôt qu’une femme. La voiture ne doit pas non plus tenir compte de l’apparence de l’être humain. La voiture ne doit donc faire aucun choix, même parmi les passagers. En 2016, un responsable de Mercedes avait émis un autre avis: entre sauver le conducteur et un piéton, il fallait sauver le chauffeur, selon lui, car c’était celui qui avait les meilleures chances de survie.
Pas de loi en Suisse
L’Allemagne sera donc pionnière. Quelle est la situation en Suisse? «Pour l’heure, nous sommes en train de réfléchir à des modifications de lois et d’ordonnances, répond un porte-parole de l’Office fédéral des routes (Ofrou). Une procédure de mise en consultation pourrait ensuite démarrer. Il est clair que le cadre législatif suisse va devoir prendre en compte l’arrivée des véhicules autonomes, également par rapport aux dispositifs techniques imposés aux voitures.» Il est possible que la distance minimale imposée entre deux véhicules soit réduite. L’Ofrou a déjà autorisé plusieurs tests. Swisscom a ainsi pu essayer une voiture autonome à Zurich, alors que des navettes autonomes de CarPostal ont circulé à Sion. «Il s’agit de tests à durée limitée et sur des tronçons définis», poursuit le porte-parole.
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Les recommandations allemandes font écho à une étude publiée en juin par des chercheurs du MIT (Institut de technologie du Massachusetts), de l’Université de l’Oregon et de l’Ecole d’économie de Toulouse. Ils avaient sondé près de 2000 personnes pour comprendre leur attitude face à des situations critiques impliquant des voitures autonomes. Parmi les résultats, l’on remarquait que pour sauver dix piétons, trois quarts des sondés estimaient qu’il était préférable que le véhicule sacrifie le passager. Un jeu a même été mis à disposition par le MIT pour les internautes.