L’impact sera alors négatif sur les ventes totales des entreprises. «Dans l’ensemble, on peut donc douter que la baisse des marges due aux promotions puisse être compensée par des ventes supplémentaires», relève Meret Mügeli, économiste chez Credit Suisse.
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Rabais de longue durée
Pour le moment, le supplément de chiffre d’affaires visé avec ces journées spéciales est plus élevé pour le commerce en ligne que pour les magasins. Le nombre d’entreprises participant à ces événements a augmenté au cours des dernières années, tout comme la durée des promotions proposées. Les détaillants ont désormais tendance à offrir des réductions pendant plusieurs jours avant ou après le «vendredi».
«Le Black Friday est synonyme d’une certaine pression sur la marge du détaillant, selon la taille de l’entreprise et sa position de négociation dans les achats», relève Dagmar Jenni, directrice de l’association faîtière Swiss Retail Federation. «Les PME que nous représentons doivent financer les rabais sur leur propre marge, car elles n’ont généralement pas le poids nécessaire pour répercuter les réductions sur les producteurs. Mais il en va autrement pour les grands détaillants», fait-elle remarquer.
Certaines entreprises ont osé franchir le pas et renoncer définitivement au Black Friday. Outre les doutes sur la rentabilité, «d’autres sociétés se sont retirées pour des raisons de durabilité et parce qu’elles ne veulent pas soutenir un consumérisme excessif, des contre-tendances qui ont également émergé parmi les consommateurs eux-mêmes», constate Meret Mügeli.
Une journée clivante
Le Black Friday reste particulièrement clivant en Suisse. Face aux incertitudes économiques, «les consommateurs achètent moins, mais le font plus volontiers lors de soldes. D’une certaine manière, la posture face à l’événement commercial ressemble à la polémique de la Coupe du monde au Qatar, il y a de nombreuses critiques, mais beaucoup regarderont les matchs», estime Jérôme Amoudruz.
La chaîne de magasins de chaussures Aeschbach fait partie des enseignes qui ont décidé de sortir du Black Friday. «Pour des raisons de valeur, c’était devenu compliqué d’assumer le fait de parler pendant 364 jours de durabilité et de responsabilité sociale de l’entreprise et de faire le contraire durant une journée», explique le directeur Sébastien Aeschbach.
«Une fois que vous mettez le doigt dans l’engrenage, il est difficile d’en sortir», fait-il remarquer. D’autant que les clients de la PME genevoise voulaient continuer à profiter de ces rabais. «Nous avons toujours des offres pendant cette partie de l’année, que nous allons désormais mettre davantage en avant. Mais nous n’allons pas solder un seul produit pour le Black Friday comme nous le faisions auparavant», explique-t-il.
Géants de l’e-commerce à l’affût
L’événement peut cependant être bien négocié et se révéler positif pour les commerçants. «Une réduction intelligemment conçue, combinée à des programmes de fidélisation, peut aussi être intéressante pour les petits détaillants, car elle permet d’augmenter la fidélité de la clientèle», considère Dagmar Jenni.
Pour la directrice de la Swiss Retail Federation, renoncer complètement au Black Friday serait contre-productif pour le commerce de détail suisse. «Les détaillants ne peuvent pas se soustraire aux besoins du marché s’ils veulent rester compétitifs et éviter de laisser le champ libre au commerce en ligne mondial. Le Black Friday est connu par 98% de la clientèle», souligne-t-elle.
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Certains détaillants en profitent pour développer des initiatives prônant une consommation responsable. Avec son offre Buyback Friday, Ikea propose aux consommateurs de racheter leurs meubles au double de ce qu’ils touchent habituellement. Quant au fabricant de sacs Freitag, il a décidé de faire du Black Friday la journée de l’échange.