Douce ou amère: le monde adore l’orange
Géopolitique des fruits (1/8)
AbonnéLa production de jus concentré a transformé le marché de ces agrumes. Avec une consommation annuelle de 20 litres par habitant, les Suisses en sont les deuxièmes buveurs, derrière les Allemands

Indigènes ou exotiques, les Suisses adorent manger des fruits. Chaque semaine de l'été, «Le Temps» raconte leur histoire, détaille les filières et analyse leur consommation.
Blonde ou sanguine, douce ou amère: l’orange est un des fruits préférés du monde. En tranches ou en jus, son goût sucré acidulé excite nos papilles et vitamine nos matins. Dans l’histoire, ses premières traces remontent en Chine, à près de 2200 ans avant notre ère. On la retrouve plus tard dans l’ancienne Egypte. Ce n’est qu’au XVe siècle que le fruit arrive en Europe. Les grands voyageurs espagnols l’ont introduit dans le Nouveau-Monde, mais ce n’est qu’au XIXe que les orangeraies fleurissent en Floride.
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Avec près de 20 litres de jus par personne par année, les Suisses sont les deuxièmes plus grands buveurs de jus d’orange du monde, derrière les Allemands. Nous en consommons au total 55 millions de litres par année. Et le monde? Il produit entre 50 et 70 millions de tonnes d’oranges dans le même temps. L’oranger étant très sensible à la pluviosité, le Brésil est champion du monde devant la Chine, les Etats-Unis et l’Inde. En Europe, l’Espagne, l’Italie et la Grèce récoltent 6,7 millions de tonnes. En 2020, la production devrait baisser à cause de faibles rendements en Europe, en Egypte, au Maroc ainsi qu’en Afrique du Sud. Au final, l’Egypte se profile comme le plus grand exportateur.
La grande révolution
Le marché de l’orange a connu sa grande révolution dans les années 1940 suite à l’invention d’un procédé de production de jus concentré qui peut être congelé et transporté aux quatre coins du monde. En ce qui concerne le commerce, avec 35% des parts de marché (fruit et jus), le Brésil en est le premier exportateur, devant les Etats-Unis.
Le marché du jus d’orange a fait l’objet d’une longue guerre commerciale entre les deux grands acteurs à l’Organisation mondiale du commerce. En 2006, Washington a accusé les exportateurs brésiliens de dumping et introduit des droits de douane punitifs. Dans un premier verdict prononcé en 2008, les juges ont donné gain de cause au Brésil. Mais en 2011, Washington a demandé de résoudre le différend à l’amiable.
Ces jours, l’attention de consommateurs se focalise beaucoup sur les conditions de travail dans les orangeraies, plus particulièrement au Brésil où toute la filière – production, transformation et commercialisation – est sous la mainmise de quelques multinationales. Suite à une enquête réalisée en début d’année, Public Eye, organisation suisse qui traque les abus des grandes entreprises dans le monde, dénonce les conditions de travail dans les plantations. Notamment les salaires de 200 francs par mois pour cueillir jusqu’à 3 tonnes d’oranges par jour.