«Virez les business plans»
Le gourou des entrepreneurs Alexander Osterwalder a assuré le show durant sa master class. «Si quelqu’un vous dit qu’il a une idée que personne n’a réalisée mais vous assure que ça va marcher, traitez-le d’idiot. Et virez-le!» a-t-il raillé.
Le Saint-Gallois est le coauteur du Business Model Canvas, une méthodologie facilitant la conversion d’idées en modèles d’affaires. Il s’est aussi entêté pendant deux heures et demie à normaliser l’échec et à creuser des ornières aux business plans («planifications financières», ndlr), des «pertes de temps et d’argent». «Je vais vous apprendre à échouer rapidement et à moindre coût», a-t-il ironisé avant de moquer la rigidité d’une multinationale de l’agroalimentaire bien connue dans la région.
Des blagues d’entrepreneurs
La méthode Osterwalder, c’est notamment une série de sept questions permettant d’identifier ce qui peut rendre un modèle d’affaires «invincible» (récurrence des revenus, coûts de structure, protection contre la compétition, etc.). Mais aussi d’en profiter pour lancer des boutades d’entrepreneurs: «Quel est le point commun entre iOS, Windows et le mariage? Il est très onéreux de les abandonner.»
Statistiques à l’appui, Alexander Osterwalder a aussi rappelé le nombre de projets lancés avant de tomber sur la perle rare, qui amènera de la croissance: 60% ne généreront pas d’argent, 35% permettront une forme de retour sur investissement et moins de 5% seront des vecteurs de croissance. Mais qu’importe, dans la salle on continue à croire au happy end et aux licornes, cet infime pourcentage de start-up qui atteignent des valorisations supérieures à 1 milliard.
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Parmi les «lauréats» de cette première volée de l’accélérateur: Malik Khalfi et son entreprise Be-Cash dont les terminaux de paiement sont utilisés par 6000 commerces, principalement romands. En huit mois, la société a triplé son chiffre d’affaires et compte désormais six collaborateurs dans ses locaux à Coppet (VD).
Sortir de soi, et des impasses
Malik Khalfi reconnaît l’apport du réseau EO, que ce soit pour apprendre à déléguer, transmettre des valeurs ou résoudre des conflits entre associés. Mais il attribue sa performance principalement à la technologie de son produit: son modèle d’entrée de gamme à 129 francs coûterait jusqu’à 15 fois moins cher que ses concurrents. «En tant qu’entrepreneur, on est souvent dans l’émotionnel alors que notre quotidien est jalonné de problèmes à résoudre. Il est très important de parvenir à sortir de soi pour éviter les impasses», explique celui qui travaillait dans le domaine bancaire jusqu’à la crise de 2008.
Jean-Marc Sabet ne dit pas autre chose. A la tête de B-Sharpe, une plateforme de change de devises visant les PME et les particuliers, il a embauché cette semaine son sixième employé à Genève. Ancien trader, se définissant comme autodidacte, il voit dans l’accélérateur des outils pour mieux «piloter sa croissance» en anticipant et en planifiant à long terme. Sans «perdre des heures à faire des business plans».
L’agence de communication Createur.ch n’a, elle, pas encore passé le cap du million de francs de chiffre d’affaires pendant ces huit mois. Mais son directeur artistique, Stéphane de Trey, est persuadé d’avoir fait moisson d’idées, notamment pour fidéliser une clientèle toujours plus prompte à faire jouer la concurrence internationale. Pour lui, c’est l’échange qui permet de perfectionner les projets: «Il faut être suffisamment humble pour ne pas garder ses idées pour soi. Le Parfait, ça n’existe qu’en tube.» En attendant la licorne rare, l’accélérateur d’EO se prépare à accueillir sa deuxième volée à la rentrée.