Lorsqu’on cherche un emploi, on fouille fatalement les sites de petites annonces, tout comme on explore Airbnb à la recherche d’un appartement de vacances ou Zalando en quête d’une nouvelle robe de soirée. Chaque jour, sur les sites suisses d’offres de travail, des centaines de nouvelles annonces sont téléchargées et motivent des centaines de milliers de Suisses en quête d’emploi. Mais combien de fois clique-t-on sur les annonces dans les diverses branches? Et quel lien existe-t-il entre les annonces publiées et le nombre de clics suivant les secteurs et les régions linguistiques?

Jobcloud, qui exploite quelques-uns des principaux sites (Jobs.ch, Jobup.ch – ce dernier appartient à Tamedia et Ringier, copropriétaire du «Temps») sur le marché suisse du travail, a analysé les choses de plus près en collaboration avec la Haute école zurichoise de sciences appliquées (ZHAW). Son étude décrit quelle annonce a suscité quel montant de clics. Plus de 30 000 annonces ainsi que la répartition de plus de 30 millions de clics ont été examinés.

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Pénurie d’informaticiens

Cette science du clic fournit un intéressant aperçu du marché du travail helvétique, surtout là où l’offre et la demande ne coïncident pas. Entre Suisse romande et alémanique, on note au sein des groupes de professions des différences marquées entre annonce et clics: en Suisse alémanique, ce sont en général les emplois du groupe informatique/télécoms qui sont les plus publiés mais restent relativement peu cliqués. Cela reflète clairement la pénurie de personnel spécialisé dont on ne cesse de se plaindre.

Le déséquilibre entre postes proposés et réponses des chercheurs d’emploi est également manifeste dans les domaines de la construction et de l’ingénierie, de la médecine et des soins. Du fait du fort déséquilibre entre l’offre et la demande, les jeunes diplômés et les professionnels chevronnés qui cherchent un emploi dans ces secteurs peuvent aisément choisir leur employeur.

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Secrétariat, administration et ressources humaines attirent l’intérêt

En revanche, dans les deux régions linguistiques, les annonces des secteurs secrétariat, administration et ressources humaines sont assaillies de clics. Le marché du travail regorgeant de ces professionnels, l’offre y est plus congrue.

En Suisse romande, la pénurie de personnel est particulièrement criante dans le domaine de la construction de machines et la production. Les annonces en la matière suscitent, relativement, très peu de clics. En revanche, s’il y a pas mal d’annonces en matière de RH et d’administration, ce sont aussi celles qui suscitent le plus d’intérêt.

«Résultat intéressant de l’étude: la recherche d’emploi et les clics des personnes en quête d’emploi ne sont pas forcément en rapport avec le taux de chômage sectoriel. Dans le domaine de la formation, par exemple, qui n’est pratiquement pas touché par le chômage, les postes vacants sont très demandés et suscitent un grand intérêt», souligne Nicoline Scheidegger, de la ZHAW.

Les Romands visent le secteur public

A noter également qu’en Suisse alémanique, au-delà de la grande distribution et du commerce de détail, l’industrie des biens de consommation ou de luxe retient fortement l’attention des personnes en quête d’emploi, de même que la formation. En Suisse romande, en revanche, on relève un intérêt accru pour les postes proposés par les collectivités publiques.

On constate que les emplois temporaires sont moins courants sur le marché suisse du travail, et d’ailleurs très impopulaires. Quelque 23% des annonces les concernent. Un salarié sur huit, soit 13,6%, occupe un emploi à durée déterminée. Autrement dit, durant la période considérée, il y a eu proportionnellement plus d’annonces pour des postes temporaires que de clics intéressés. Les auteurs de l’étude en concluent que les entreprises montrent peut-être une certaine circonspection, de l’insécurité.

Pour les responsabilités, le plein-temps domine

Le besoin d’un surcroît de postes à temps partiel au niveau directionnel, souvent souligné par les experts, est contrarié par l’analyse des annonces et les relevés de clics: 87% des emplois de direction sont assortis d’un plein-temps. Apparemment, l’idée reste répandue qu’un responsable, s’il entend réussir, doit forcément consacrer l’entier de sa semaine de travail à son job.

Les hommes suscitent plus d’intérêt

On remarque aussi – et ça nous ramène à la réalité – que les profils d’emploi masculins font l’objet de beaucoup plus de clics que leurs homologues féminins. Est-ce à dire que les hommes se vendent mieux sur les sites d’emploi ou que les recruteurs manifestent une préférence de genre? Les interprétations restent ouvertes et les auteurs de l’étude ne commentent pas. «A la différence des sondages, toujours empreints d’un certain flou, nos données se fondent sur les comportements effectifs que nous observons sur les sites Jobs.ch et Jobup.ch», fait remarquer Renato Profico, de Jobcloud. Cette étude de comportement permet de faire directement le rapport entre les annonces publiées et les clics des requérants d’emploi. Et la comparaison confirme quelques clichés, notamment l’intérêt des Romands pour le service public ou des faits bien établis tels que la pénurie claire et nette de spécialistes IT en Suisse alémanique.