Contrinex produira désormais une partie de ses capteurs de position au Sri Lanka. Le groupe de Corminboeuf (FR) qui employait jusqu’à présent 550 personnes délocalise une partie de ses activités sur la lointaine île. La surévaluation chronique du franc mettait en péril la survie de l’entreprise, explique sa directrice Annette Heimlicher en qualifiant la politique de la BNS de «suicidaire», dans l’Agefi.

Le baromètre UBS des petits et moyennes entreprises (PME) confirme ces difficultés. Cet indice – qui prend le pouls du secteur industriel – a chuté de 0,22 point à -0,38, entre octobre et janvier. Il est même (pour les entreprises de moins de 200 personnes) en zone négative depuis octobre 2014, soit trois mois avant l’abolition du taux plancher.

La baisse du baromètre d’UBS est malgré tout considérée comme «modérée» par Sibille Duss, économiste et coauteure de l’étude, qui la met sur le compte de la diminution des commandes et d’un niveau de production plus bas.

Un industriel sur quatre est déficitaire

Du côté de la faîtière Swissmem, on rappelle que le risque d’une lente désindustrialisation persiste. «Deux ans après l’abolition du taux plancher, 57% des entreprises n’ont toujours pas réussi à générer des marges suffisantes pour investir à l’avenir», commentait fin février son président Hans Hess, lors de la présentation d’un sondage dans l’industrie des machines, des équipements électriques et des métaux suisse.

En 2016, 23% de ces entreprises ont terminé l’exercice avec un résultat EBIT (résultat avant intérêts et impôts) déficitaire. En 2014, lorsque la BNS défendait encore le taux de 1,20 franc pour 1 euro, elles n’étaient que 7%.

Si 46% des entreprises envisagent de délocaliser une partie de leurs activités à l’étranger dans les trois ans, l’emploi souffre déjà de la conjoncture actuelle. Depuis l’abolition du taux plancher, 12 600 emplois ont été supprimés dans un secteur qui occupe actuellement 317 600 personnes. Une érosion à mettre sur le compte de la robotisation? Sibille Duss est sceptique: «Il s’agit d’un phénomène qui vient de plus loin. Mais ce qui est sûr, c’est que le secteur des services créé plus d’emplois. A plus long terme, il faut donc s’attendre à un recul – en proportion – du secteur secondaire.»

Craintes pour la stabilité de l’euro

Autres facteurs de préoccupation: la stabilité de la zone euro avec un calendrier marqué par des échéances politiques mouvementées. Une victoire du populiste Geert Wilders aux élections néerlandaises du 15 mars «pourrait créer un effet boule-de-neige sur les autres partis populistes comme le Front national», prévenaient les analystes d’IG Bank jeudi.

Du côté d’UBS, on s’attend pourtant à un renversement de tendance pour l’économie suisse, avec une baisse du taux de chômage. «Nous tablons sur une hausse du franc contre l’euro après les élections françaises, avec, à six mois, une devise helvétique à 1,12», explique Sibille Duss. Autrement dit: Marine Le Pen ne sera pas élue présidente et la rentabilité de l’industrie suisse d’exportation en sortira gagnante.