Vente
Le chiffre d’affaires du secteur a baissé de 4,6% en juin. Vêtements et chaussures sont encore plus touchés: -7,7%. Tourisme d’achat et ventes en ligne expliquent cette érosion accélérée

C’est la baisse la plus spectaculaire depuis 2003. Le commerce de détail a reculé en juin de 4,6%, par rapport à l’année dernière, selon le dernier sondage de l’Office fédéral de la statistique (OFS), publié mardi. Mis à mal par le franc fort, les supermarchés, boutiques et autres négoces voient leur chiffre d’affaires diminuer de manière ininterrompue depuis janvier 2015, date de l’abolition du taux plancher.
Une tendance due principalement au secteur non-alimentaire, rappelle Patricia Feubli, économiste chez Credit Suisse. «Le recul des ventes de produits de mode a été encore plus fort que dans les autres secteurs avec -5,1%», rappelle la spécialiste du commerce de détail, qui attribue cette contraction principalement au tourisme d’achat dans les pays voisins.
Un franc sur dix dépensé à l’étranger
En 2015, les consommateurs suisses ont dépensé environ 11 milliards de francs d’achats à l’étranger. L’équivalent «d’un franc sur dix dépensé en Suisse va remplir les caisses des détaillants étrangers – de toute évidence, le tourisme d’achat n’est plus un phénomène marginal», conclut une récente étude de Credit Suisse.
Rien que sur le mois de juin, le commerce d’habits et de chaussures a reculé de 7,7% en valeur réelle, selon l’étude de l’OFS. Un mois néfaste pour les boutiques, notamment en raison de la météo maussade.
Près de 500 postes biffés
La diminution des ventes de produits non alimentaires devrait se poursuivre sur 2016, mais de manière moins «marquée» qu’en 2015, selon les prévisions de Credit Suisse. Pour certains, le mal est déjà fait. En avril, le marchand de chaussures Bata, dont le siège est à Lausanne, décrétait la fermeture de ses 29 enseignes suisses, licenciant au passage 175 employés.
Une semaine plus tard, c’est Vögele qui annonçait un déficit de 62 millions de francs sur son chiffre d’affaires 2015, en baisse pour la cinquième année consécutive. Le groupe de confection qui a déjà biffé une cinquantaine de postes au début de l’année a rappelé que des licenciements supplémentaires «ne sont pas un tabou».
Les sites de ventes gagnent des parts de marché
Parmi les raisons évoquées de ce recul, la concurrence des plateformes de vente en ligne et la saturation du marché. «Les sites de vente en ligne continuent à gagner des parts de marché en Suisse. En particulier Zalando dans le secteur de la mode», souligne Patricia Feubli. En 2015, le chiffre d’affaires des commerçants en ligne a progressé de 7%, contre 1,5% pour l’ensemble du commerce de détail, selon Credit Suisse.
Zalando ne communique pas ses résultats par pays mais, selon le cabinet de conseil en e-commerce Carpathia, le groupe aurait généré un chiffre d’affaires en Suisse de 425 millions de francs en 2015. Présent en Suisse depuis mai 2015, Sarenza revendique, lui, une croissance à «deux chiffres de mois en mois» sur le marché helvétique, l’un des cinq plus grand du groupe présent dans 27 pays, explique son directeur et fondateur Stéphane Treppoz. C’est un phénomène structurel. Il y a un transfert des parts de marché vers la vente en ligne.»
Stagnation du secteur alimentaire
Les ventes de denrées alimentaires, boissons et tabac (sans les stations-service) ont, elles, diminué en juin de 1,7% en termes réels. Du côté de la Coop, on évoque un «contexte qui reste exigeant» tout en affirmant continuer à gagner des parts de marché. Le géant de la distribution a annoncé un recul de 4,4% de son chiffre d’affaires 2015 et la suppression de 250 postes dans le commerce de détail.
Même message pour la Migros qui parle d’une année 2016 «difficile», notamment en raison du tourisme d’achat. En 2015, son chiffre d’affaires stagnait à 0,1%. Mais, pendant ce temps, sa filiale en ligne LeShop a accru ses ventes de 6,6%.