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En Europe, les rachats de sociétés de téléphonie se poursuivront

L'acquisition de O2 par Telefonica s'inscrit dans un large mouvement de concentration. Le Danois TDC, propriétaire de Sunrise, pourrait être la prochaine cible.

Quarante milliards de francs, cash. Telefonica n'a pas hésité à ouvrir grand son porte-monnaie pour s'offrir les 25 millions de clients de l'opérateur de téléphonie mobile O2, présent en Angleterre, en Allemagne et en Irlande. Un rachat qui est le dernier d'une longue liste, une liste qui pourrait d'ailleurs s'allonger dans les prochaines semaines. Le 27 juillet, France Télécom s'emparait de 80% de l'opérateur mobile espagnol Amena pour 9,9 milliards de francs. Entre juin et septembre, Telefonica, encore lui, déboursait 5,5 milliards de francs pour détenir 69% de Cesky Telecom, une proie convoitée aussi par Swisscom. En mai, Vodafone s'implantait en Roumaine et en République tchèque avec le rachat de Telesystem International Wireless, pour 4,44 milliards de francs.

Le vent de folie qui avait soufflé sur le secteur entre 1999 et 2000 se lèverait-il à nouveau? Sans doute pas. D'abord, l'on reste très loin des sommes insensées déboursées alors, lorsque Vodafone avait dépensé 280 milliards de francs pour racheter les activités de téléphonie mobile de Mannesmann en Allemagne. Ensuite, les prédateurs actuels génèrent et continueront à générer du cash: 150 milliards d'euros d'ici à 2008, selon JP Morgan. Leur dette sous contrôle, les chasseurs sont devenus prudents face à leurs actionnaires. Telefonica a précisé lundi que ce rachat allait améliorer sa rentabilité, et qu'il n'allait ni diminuer ses dividendes, ni modifier son programme de rachat d'actions. Echo similaire chez France Télécom, qui réaffirmait, après le rachat d'Amena, sa volonté de réduire sa dette à 2,5 fois ses revenus en 2005, et deux fois d'ici à 2008.

Les opérateurs ont les moyens de procéder à des acquisitions importantes, mais en valent-elles la peine? Les cibles actuelles sont intéressantes. Le chiffre d'affaires de O2 devrait croître de 9% sur l'année fiscale close en mars 2006, soit deux fois plus que celui de Vodafone. Autre exemple, Amena a intéressé France Télécom car l'Espagne est l'un des seuls pays où la facture moyenne des abonnés a augmenté depuis un an. Pour inciter les clients à utiliser davantage leur portable - ceux de Vodafone téléphonent en moyenne «seulement» 4 minutes par jour -, les opérateurs se lancent désormais dans des campagnes de publicité majeures. Vodafone vient de lancer sa campagne unifiée «Now» dans 27 pays, alors que Orange (propriété de France Télécom) vient de choisir des annonces différenciées par pays. Télévision mobile, «chat», abonnement à des services d'information et de divertissement: pour convaincre leurs clients de dépenser plus, les opérateurs doivent aujourd'hui investir fortement dans la publicité. Atteindre une taille critique devient ainsi un enjeu important, d'autant que les investissements en infrastructure et logiciels se poursuivent. A moyen terme - mais pas avant trois ans au minimum, estimait la semaine passée Alan Harper, directeur de la stratégie de Vodafone -, les opérateurs devront aussi se battre face à la téléphonie mobile via Internet.

Le prochain champ de bataille se situe certainement au Danemark, où TDC, propriétaire de Sunrise, fait l'objet de rumeurs de rachat pour 15 milliards de francs. Ironie du sort, un fonds d'investissement anciennement propriétaire de Cablecom, Apollo Management LP, pourrait faire partie des acquéreurs de TDC et ainsi revenir en Suisse par le biais de Sunrise.

De plus, le néerlandais KPN, qui avait songé à acquérir O2, pourrait à son tour se transformer en cible. Swisscom, dont 25% de la division de téléphonie mobile appartient à Vodafone, ne fera a priori pas l'objet de manœuvres tant que la Confédération détiendra 66,1% de son capital.