L’échange automatique d’informations sur les rescrits fiscaux – accords passés entre Etats et multinationales qui déterminent en avance le taux d’imposition – sera une réalité à partir de janvier 2017. Au lendemain de la présentation du programme de l’OCDE «Erosion de la base d’imposition et du transfert de bénéfices», plus connu sous son acronyme anglais BEPS, les ministres européens des Finances ont décidé mardi de mettre en œuvre l’une de ses mesures phares de lutte contre la planification fiscale des entreprises au sein de l’Union. «Nous donnons ainsi un signal fort en termes de transparence», a déclaré Pierre Moscovici, commissaire chargé des Affaires économiques et financières et de Fiscalité. Bruxelles va plus loin que la recommandation de l’OCDE qui ne prône qu’un échange spontané d’informations entre les autorités fiscales.

Un rescrit fiscal, «tax ruling» dans le jargon financier, n’est pas forcément illégal. En revanche, il peut porter des éléments de concurrence déloyale que des Etats utilisent pour attirer des entreprises étrangères. A partir de janvier 2017, les Etats qui signent de tels accords, doivent en informer la Commission. Celle-ci maintiendra un registre central pour assurer la transparence en matière fiscale et pour détecter d’éventuels d’abus d’aide d’Etat. Les ministres ont également accepté une clause de rétroactivité de cinq ans.
La Suisse n’est pas membre de l’Union européenne, mais elle n’en est pas moins concernée. D’autant plus que les cantons mènent une politique active pour attirer des entreprises étrangères en leur offrant diverses facilités. En visite à Berne en mai dernier, le président de la Commission Taxe du Parlement européen, l’eurodéputé français Alain Lamassoure avait laissé comprendre que la Suisse doit adhérer à l’échange automatique d’informations sur les tax Rulings; de nombreuses entreprises européennes sont en effet installées en territoire suisse.

Berne s’alignera sur l’OCDE

«En Suisse, les rulings respectent le cadre législatif», souligne Vincent Simon, responsable de projets Finances et Fiscalité à economiesuisse. Pour sa part, Mario Tuor, chargé de communications au Secrétariat d’Etat aux questions financières internationales, explique que Berne entend suivre la recommandation de l’OCDE. Le Conseil national s’est penché sur un système d’échange spontané d’informations en septembre. Le Conseil des Etats prendra le relais en décembre prochain.
En Europe, le coup d’accélérateur à l’échange automatique d’informations sur les rescrits fiscaux a été donné suite au scandale dit Luxleaks. La révélation faite en novembre dernier de près de 400 tax rulings signés entre le Luxembourg et des multinationales n’est en effet pas restée sans conséquence. La pression était forte sur le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker qui était le chef du gouvernement luxembourgeois entre 1995 et 2013. C’est durant ces années-là que le plus grand nombre d’accords fiscaux avaient été signés.