Pour consolider son économie fragile, l’Argentine s’est tournée vers le Fonds monétaire international (FMI), qui lui a accordé un prêt de 50 milliards de dollars, en échange duquel elle s’est engagée à de profondes réformes pour limiter les dépenses de l’Etat.

«Nous avons fait appel au FMI à titre préventif, pour éviter une crise, a déclaré le ministre argentin de l’Economie, Nicolas Dujovne, lors d’une conférence de presse à Buenos Aires. Nous sommes engagés dans la construction d’un pays normal. C’est un soutien à notre programme, avec comme objectif que l’économie croisse, que l’inflation et la pauvreté diminuent.»

La situation de l’Argentine n’est pas catastrophique, mais le pays sud-américain a besoin de renforcer ses réserves, de stabiliser le marché des changes et de créer un meilleur climat économique pour attirer les investissements. L’inflation annuelle dépasse les 20% depuis dix ans. Le président argentin de centre droit, Mauricio Macri, avait sollicité l’aide du FMI et son ministre de l’Economie avait entamé le 8 mai des pourparlers avec l'institution.

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Objectif: une inflation de 17% pour 2019

De Washington, le FMI a précisé que l’accord devait encore être approuvé par le directoire du FMI. La directrice générale du FMI, Christine Lagarde, a «félicité les autorités argentines» et s’est dite ravie que le Fonds puisse «contribuer à cet effort en apportant un soutien financier, qui donnera confiance aux marchés».

«Le plan économique du gouvernement argentin comprend un rééquilibrage de la situation budgétaire. Nous saluons cette priorité et l’intention d’accélérer le rythme de la réduction du déficit budgétaire pour arriver à l’équilibre en 2020.»

Le ministre argentin a précisé que l’Argentine s’était fixé comme objectif une inflation de 17% pour 2019, 13% pour 2020 et 9% pour 2021. L’accord révise l’objectif de déficit budgétaire, avant paiement de la dette, à 2,7% du PIB en 2018, contre 3,2% prévu précédemment.

Après la crise du peso d’avril-mai, au cours de laquelle la monnaie argentine s’est dépréciée de près de 20%, Mauricio Macri a fixé comme priorité la baisse du déficit budgétaire. Celui-ci est passé de 6 à 3,9% du PIB en deux ans de gestion de l’homme fort du pays, arrivé au pouvoir fin 2015.

Un contexte de tensions exacerbé par l’inflation

Cette politique de rigueur représente un mauvais moment à passer pour la population, avertit l’économiste Daniel Marx, ancien secrétaire aux Finances, mais le pays «en tirera les bénéfices ensuite». L’économiste Carlos Fara souligne que le gouvernement devra veiller à ce que «ne s’installe pas une récession féroce. Pour l’heure, les économistes et chefs d’entreprise annoncent un ralentissement, accentué par les ajustements inévitables pour réduire les dépenses publiques.»

«Cette année, on va croître un peu moins et l’inflation sera plus forte que prévue», a admis Nicolas Dujovne. Après une croissance de 2,8% en 2017, la prévision d’augmentation du PIB pour 2018 est d’environ 1,8%, alors que les autorités tablaient initialement sur 3%.

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L’accord avec le FMI intervient dans un contexte de tensions entre le gouvernement et les syndicats, qui menacent de convoquer une grève générale, se plaignant que les hausses de salaires ne compensent pas l’inflation. En effet, cette dernière est repartie de plus belle en 2018, plus de 10% depuis le début de l’année, et le gouvernement freine les augmentations de salaires.

Le dernier recours au FMI de l’Argentine remonte aux années 1990. Le président Carlos Menem (1989-1999) avait instauré un taux de change fixe, 1 peso argentin équivalant à 1 dollar, une politique soutenue par le FMI qui avait conduit le pays au défaut de paiement et à la crise économique de 2001. «Ce n’est pas le même FMI», a déclaré à plusieurs reprises ces derniers mois le chef du gouvernement, Marcos Peña, pour rassurer les Argentins, préoccupés de voir revenir le FMI dans l’orbite de la 3e économie d’Amérique latine.