Pour la troisième fois de suite, la Réserve fédérale américaine (Fed) a relevé mercredi ses taux d’intérêt de 75 points de base sans faire ciller quiconque. Certains pariaient même sur une hausse encore plus forte, de 100 points de base. C’est dire si les temps ont changé. Il y a un an, un tel scénario aurait semblé totalement farfelu. Son taux évolue désormais dans une fourchette de 3% à 3,25%. Dans son communiqué, le comité de politique monétaire de la Fed souligne que des hausses supplémentaires seront «appropriées».

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Entre-temps, l’inflation a flambé et peine à refluer. En août dernier, elle était encore à 8,3%. La pression des cours de l’énergie a certes diminué, mais les prix continuent d’augmenter dans beaucoup d’autres secteurs, en particulier dans le logement. Sujet hautement politique, la lutte contre l’inflation est devenue la priorité de la Fed, qui s’est à nouveau dite «hautement attentive aux risques d’inflation» et «fortement attachée à revenir à son objectif de 2%». Au risque de donner un violent coup de frein à la croissance.

Plus de chômage

Pour l’heure, la banque centrale profite d’un marché de l’emploi en bonne santé, avec un taux de chômage historiquement faible de 3,7%. Or, cela pourrait changer. Car les hausses de taux devraient avoir un impact sur l’activité économique et donc sur l’emploi. La Fed a ainsi revu à la hausse ses prévisions d’inflation et de chômage et à la baisse celles de la croissance.

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Cette dernière devrait être quasi nulle cette année (+0,2%), alors que l’institution anticipait encore 1,7% lors des projections de juin dernier. Quant à l’inflation, elle devrait culminer à +5,4% cette année (contre +5,2% prévus en juin) et redescendre à +2,8% l’an prochain (contre +2,6% prévus en juin). Le chômage, lui, devrait progresser à 3,8% cette année, puis à 4,4% l’an prochain (contre 3,7% et 3,9%, prévu précédemment). Les responsables de la Fed anticipent que le taux directeur atteindra 4,4% à la fin de l’année et montera jusqu’à 4,6% l’an prochain.

Dans une note, Thomas Costerg, économiste de Pictet Wealth Management, soulignait les risques: «La Fed reste concentrée sur les données passées, et en particulier le duo inflation et emploi, et non sur les perspectives économiques qui continuent de s’assombrir.» Pour lui, certains indicateurs tels que l’inflation attendue à cinq ans par le marché auraient pu l’alerter sur le risque grandissant d’erreur de politique monétaire. L’économiste s’inquiète de la rapidité des hausses de taux alors que la dette totale est très élevée depuis la pandémie. Parmi les dangers, il cite par exemple les consommateurs américains qui sont remis à «sur-utiliser leurs cartes de crédit» et le marché immobilier «fortement fragilisé», qui «comporte un effet d’entraînement important sur l’économie».