Actuellement, Euronext et Deutsche Börse possèdent toutes les deux leur propre chambre de compensation, respectivement LCH Clearnet et Eurex Clearing. C'est un peu comme si les agences immobilières étaient à la fois responsables des actes notariés et des transactions bancaires lors de la vente d'une propriété. C'est cette concentration «verticale» qui inquiète la Commission de la concurrence.
Elle demande donc à Euronext de réduire sa participation dans LCH Clearnet de 41% à 15% et de supprimer trois de ses sièges à son conseil d'administration, pour n'en garder plus qu'un seul. Ses demandes sont similaires pour Deutsche Börse et Eurex Clearing.
La balle est désormais dans le camp des deux Bourses d'Europe continentale. Tout indique qu'elles ne vont pas se presser pour formuler une offre. Au printemps, Deutsche Börse avait renoncé à s'emparer du LSE, sous la pression de ses actionnaires, qui trouvaient l'acquisition trop chère. Hier, elle a certes indiqué qu'elle restait ouverte sur le principe à de nouvelles discussions. Cependant, selon une source proche du conseil de surveillance de la Bourse allemande, citée par l'AFP, le nouveau patron du groupe, Reto Francioni, ne devrait pas soulever la question pour l'instant.
Euronext se contente d'affirmer pour sa part qu'elle «va analyser l'impact économique potentiel» de la décision de la Commission de la concurrence.
Ce manque d'enthousiasme a une autre source: la Bourse de Londres est désormais très chère. Quand les négociations ont commencé il y a presque un an, l'action du LSE était aux alentours de 430 pence. Elle en vaut 570 aujourd'hui, soit 30% de plus.
Les actionnaires d'Euronext ne cachent pas leur inquiétude. Plusieurs d'entre eux ont fait savoir qu'ils s'opposeraient à une offre en cash sur le LSE. C'est notamment le cas de TCI Fund Management, qui a averti Jean-François Théodore, le patron d'Euronext, qu'il risquait de perdre sa place s'il tentait de passer en force. Ce dernier aura certainement été très attentif à cette mise en garde, dans la mesure où c'est justement ce fonds d'investissement qui a mené la campagne s'opposant à l'offre faite par Deutsche Börse.
La situation apparaît donc bloquée. Deux solutions pourraient cependant se présenter. Euronext pourrait faire une offre par échange d'actions, comme l'affirmait le Financial Times samedi. Par ailleurs, la banque australienne Macquarie pourrait elle aussi faire une offre. Elle a fait savoir qu'elle y réfléchissait depuis plusieurs mois. Si elle passe à l'action, elle obligera Euronext et Deutsche Börse à réagir, pour ne pas laisser s'échapper la proie.