Lymo renaît de ses cendres. Le groupe genevois, qui se présente en «place de marché» réunissant des chauffeurs professionnels et leurs clients, avait suspendu ses activités en mai à la suite d’un préavis défavorable de la Suva. Le principal assureur accidents de Suisse considérait les chauffeurs inscrits sur sa plateforme comme des salariés et non des indépendants. La jeune pousse s’était retirée dans la foulée, «temporairement», comme Kapten huit mois plus tôt.

Lymo et Kapten, qui s’étaient lancés à peu près en même temps au bout du lac (en février 2019), semblaient d’autant plus hors course que la pandémie a quasiment mis à l’arrêt les taxis et les VTC et que l’emprise d’Uber paraissait totale. Le lancement de Lymo avait en plus déjà été retardé l’été dernier, à la suite de problèmes techniques contre lesquels un nouvel investisseur, Stan Wawrinka, semblait impuissant.

Des vues sur la Californie

Mais non. Revoilà l’application Lymo. La société signe un retour sur le devant de la scène d’autant plus fracassant que la «place de marché» s’imagine déjà proposer ses services à l’international, de la France à la Californie, et envisage à cette fin des levées de fonds importantes, lit-on vendredi dans une dépêche de l’AWP.

«La Suva nous a informés en juin qu’elle autorisait les chauffeurs utilisant Lymo à avoir le statut d’indépendant», se réjouit Mélanie Malhamé, directrice de Lymo, au téléphone. Concrètement, un chauffeur demandant ce statut à l’Office cantonal des assurances sociales, un organisme genevois qui décide en fonction des directives de la Suva, peut désormais l’obtenir. Deux rencontres ont eu lieu ce printemps entre la direction de Lymo et la Suva, à Genève et à Lucerne, avant que l’autorité fédérale ne tranche.

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Travailler avec des indépendants, ça change tout pour les diffuseurs de courses. Car autant un géant, comme Uber, qu’une start-up ne peut s’y retrouver financièrement si les chauffeurs sont ses employés. Uber livre de nombreux combats en justice, dans le monde et à Genève, pour démontrer que ce n’est pas le cas. En Suisse, la Suva considère néanmoins que les professionnels utilisant Uber, ou Kapten, sont leurs employés.

Pourquoi est-ce différent pour Lymo? Parce que le modèle du groupe genevois donne beaucoup plus de libertés aux chauffeurs, selon la Suva. Lymo se contente d’être l’organisateur d’un marché pour lequel les utilisateurs ne doivent pas débourser plus de 15 francs par semaine (contre 35 francs à son lancement en 2019) pour y tenir un stand. Ils sont ensuite libres de fixer leur prix eux-mêmes, d’accepter ou non une course, de rouler en Fiat ou en Tesla et de travailler quand ils veulent.

Coûts faibles et gros volumes

L’emprise d’Uber, et jadis de Kapten, est autrement plus importante, selon la Suva. La multinationale américaine prend une commission de 27% par course, fixe les tarifs et verse ce que beaucoup voient comme des salaires. La principale centrale de taxis à Genève, Taxiphone, demande de son côté plus de 700 francs par mois à ses chauffeurs affiliés.

Des coûts fixes faibles et de gros volumes doivent permettre à Lymo de trouver le chemin de la rentabilité. Environ 350 chauffeurs sont inscrits sur la plateforme, qui doit redémarrer ses activités en septembre.

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