Financer la transition écologique et énergétique nécessitera des sommes stratosphériques, probablement des milliers de milliards. Le secteur financier aura un rôle prépondérant à jouer pour faire émerger une économie respectueuse de l’environnement. Reste à savoir comment. Le marché des obligations vertes aide les entreprises déjà vertueuses à diminuer leur empreinte écologique. D’autres initiatives veulent permettent aux acteurs de secteurs plus polluants de financer eux aussi leur transition. A l’heure où l’Union européenne vient de lancer un plan à 390 milliards d’euros pour investir notamment dans la transformation écologique, des chercheurs britanniques proposent des pistes concrètes à travers lesquelles les banques pourraient financer la transition écologique et, surtout, la rendre «équitable», c’est-à-dire qui ne laisserait pas sur le bas-côté les individus ou les régions plus vulnérables.

Reconstruire en mieux. L’expression revient à plusieurs reprises dans Comment le système bancaire peut soutenir une transition juste en Grande-Bretagne, le rapport publié à la fin de juin par quatre chercheurs de la London School of Economics et de l’Université de Leeds. Pour reconstruire l’économie et atteindre la neutralité carbone d’ici à 2050, les auteurs insistent sur la dimension sociale du changement à venir, qui ne doit pas se limiter à la réduction des émissions de gaz à effet de serre décidée dans le cadre de l’Accord de Paris de 2015. Notamment car 10% des travailleurs en Grande-Bretagne – soit environ 3 millions de personnes – vont se trouver plus vulnérables suite à la transition écologique. Soit parce que leurs savoir-faire seront obsolètes, soit parce qu’ils seront davantage pénalisés par une hausse du coût de l’énergie, en particulier. La pandémie de Covid-19, qui exacerbe les inégalités sociales et révèle la précarité de certaines couches de la population, fournit un avant-goût des difficultés qu’engendrerait une transition écologique qualifiée d’injuste, résument les auteurs.

Injecter de la flexibilité

Selon eux, le système financier doit pleinement soutenir cette transition, y compris sur le plan social. Les auteurs formulent ainsi des recommandations pratiques, soulignant que «l’idée d’assurer une transition juste n’est généralement pas reflétée dans les stratégies climatiques des banques», citant une enquête d’avril 2020 de ShareAction, une ONG qui soutient l’investissement responsable.

Davantage que des capitaux, les institutions financières devraient avant tout injecter de la flexibilité dans leurs pratiques, affirme l’étude de la London School of Economics et de l’Université de Leeds. En prêtant à des taux d’intérêt plus bas aux ménages et entreprises qui souhaitent «verdir» leur style de vie et leurs activités, par exemple lors de rénovations de bâtiments. Des produits financiers de ce type existent déjà, ils devraient être généralisés, selon les chercheurs.

Lire aussi: Finance durable: la direction est donnée, les moyens d’avancer viendront plus tard

Ces derniers recommandent également une lecture plus fine des besoins des clients des banques, et donc une offre plus ciblée. Notamment pour offrir des maturités ou des échéances de remboursement plus favorables aux fournisseurs de PME impliquées dans de grands projets de transition écologique. Ou proposer des taux d’intérêt plus attractifs permettant de compenser le coût de la transition. L’étude cite notamment la stratégie de HSBC au Mexique, où la banque offre de meilleures conditions aux fournisseurs des supermarchés Walmart qui respectent certaines normes de durabilité.

Partager le risque

Pour les PME qui risquent d’être fragilisées par la transition, le rapport suggère aux banques d’encourager les investissements «positifs», visant par exemple à former ou à redéployer des collaborateurs.

Tous les besoins liés à la transition ne seront pas viables sur le plan commercial, relèvent aussi les auteurs. Pour limiter leur risque financier, les banques devraient collaborer davantage avec la société civile et le secteur public pour développer ce qui est déjà appelé la «blended finance».