Au crépuscule de ce qui s’annonce comme la meilleure année boursière depuis la crise financière, les chiffres de l’emploi américain, publiés vendredi, auraient pu gâcher la fête.

Non pas qu’ils soient inquiétants. Au contraire. A Washington, le département du travail a indiqué que le taux de chômage avait reculé de 0,3 point de pourcentage en novembre, à 7%. Une première depuis novembre 2008. Les créations nettes d’emplois ont, elles aussi, nettement dépassé les attentes des analystes, avec 203 000 unités. Les prévisionnistes tablaient sur 188 000 nouvelles embauches, et un taux de chômage de 7,2%.

Ces signes d’amélioration de la conjoncture américaine auraient pu faire peur à la communauté financière, inquiète depuis plusieurs mois que la Réserve fédérale (Fed), compte tenu du redressement de l’activité, ne finisse par annoncer une réduction de son programme d’injection de liquidités (quantitative easing). Ces derniers jours, d’ailleurs, les bourses américaines, mais aussi européennes, s’étaient affichées en repli, avant cette salve de statistiques.

Tendance inverse vendredi: Francfort (+ 0,96%), Paris (+ 0,72%) et les autres ont continué leur ascension sur fond de bonne santé économique américaine. Wall Street leur a emboîté le pas (+ 0,8%, à l’ouverture), limitant ainsi l’ampleur de la première semaine de baisse depuis deux mois.

L’explication de cette hausse boursière est l’évolution du sentiment vis-à-vis de la Fed. L’on estime désormais que son comité de politique monétaire préférera voir la reprise se confirmer avant de réduire ses injections de liquidités. Les analystes qui s’attendaient à une telle annonce en décembre ou en janvier – la prochaine réunion de la Fed a lieu les 16 et 17 décembre – sont devenus minoritaires. Une majorité d’entre eux parient sur une première annonce au mois de mars, voire au mois de juin 2014.

Ben Bernanke temporise

La Réserve fédérale a, il est vrai, donné des signes dans ce sens. Mardi, son président, Ben Bernanke, a expliqué devant un parterre d’économistes réunis à Washington que l’institution pouvait se montrer patiente, cherchant à s’assurer que le marché du travail est suffisamment solide avant de considérer une hausse de son taux d’intérêt directeur.

Celui qui cédera sa place et la responsabilité du ralentissement du programme de rachat d’actifs à Janet Yellen se met à temporiser. Ce d’autant plus que la banque centrale ne surveille pas que le marché de l’emploi. Elle a aussi un œil attentif sur l’inflation. Laquelle, pour l’instant, ne montre pas de signe de redressement. Elle s’éloigne même de l’objectif de 2% fixé par la Fed, puisqu’elle a décéléré pour le troisième mois consécutif en octobre. Elle se limite à 0,7% sur un an, a-t-on aussi appris vendredi,

Dans ce contexte, les actions devraient poursuivre leur chemin haussier. Dans une note, Russ Koesterich, responsables des investissements pour BlackRock, juge que si les valorisations sont plus élevées qu’il y a un an, «nous ne sommes pas dans une situation de bulle et les actions continuent de constituer un meilleur choix que les obligations et le cash pour les investisseurs».

«Encore plus haut»

D’accord avec ces prévisions, les analystes de Deutsche Bank avancent un autre argument: «De nombreux investisseurs sous-pondèrent les actions. Peu d’entre eux ont vraiment bénéficié du rallye des bourses. C’est en train de changer lentement, mais le mouvement pourrait s’accélérer en 2014 et leur arrivée pourra pousser les indices encore plus haut», estime la banque allemande.

Même son de cloche du côté de Pictet, qui, lors d’une présentation jeudi à Zurich, a affiché son optimisme, misant en particulier sur les titres européens, que la banque genevoise considère comme meilleur marché que les actions américaines.