L'environnement inflationniste actuel, dû aux prix élevés des matières premières, devrait permettre aux macrotraders de continuer à dégager des profits grâce aux paris à sens unique sur les devises des marchés émergents asiatiques. Malgré les récentes prises de profit sur les devises de certains de ces pays, nous doutons qu'il s'agisse là d'une nouvelle tendance. Au contraire, ce relâchement temporaire ne fait que nous conforter dans le sens de nouvelles appréciations.

La pression à la hausse sur les prix des matières premières demeure une composante essentielle du problème de l'inflation sur les marchés émergents. Bien que la hausse soudaine des matières premières telles que le pétrole puisse être en partie mise sur le compte de l'approvisionnement et de la spéculation, le facteur le plus déterminant est la demande intérieure réelle de pays asiatiques comme l'Inde et la Chine. Les pays asiatiques émergents à plus faibles revenus sont, eux, largement exposés à la brusque flambée des prix des matières premières agricoles, notamment du riz, en raison des habitudes alimentaires locales.

Sans un ralentissement significatif de la production et donc de la demande intérieure en Asie, les chances d'une baisse prononcée à court terme sont très incertaines, et il est plus probable que la hausse des prix continuera à avoir des répercussions. Il est vrai que la croissance industrielle chinoise s'est légèrement ralentie pour atteindre 15,70% en glissement annuel. Une baisse dérisoire, si l'on considère que dans tout autre pays, un tel chiffre serait considéré comme très élevé. Cependant, la hausse de l'inflation a récemment surpris le marché, en atteignant 8,5% en glissement annuel en avril. Nous tablons sur une modération relative des prix des matières premières car le ralentissement des pays développés devrait s'étendre à l'Asie. Toutefois, cette baisse ne devrait pas suffire à mettre un terme à la spirale inflationniste.

Jusqu'à présent, les réactions des banques centrales asiatiques ont été variables et même plutôt réservées. Elles ont souvent préféré utiliser le marché des devises comme leur principal outil de lutte contre l'inflation et ont tout d'abord manifesté une certaine réticence à utiliser la politique des taux d'intérêt. Néanmoins, des pays comme l'Inde, les Philippines et l'Indonésie ont d'emblée adopté une attitude de fermeté face à la menace inflationniste. Dans ce contexte, nous prévoyons que la Banque centrale indienne resserrera davantage ses taux à très court terme et, bien que la Chine et la Thaïlande se soient montrées les plus sensibles à la baisse de la croissance, ces deux pays semblent eux aussi privilégier une politique de resserrement; une voie dans laquelle la Chine s'est d'ores et déjà engagée. Quoi qu'il en soit, que les banques centrales utilisent la politique monétaire ou qu'elles assouplissent leurs taux de change, leurs devises s'apprécieront.

Cela étant dit, quelles sont les opportunités qui en découlent? Nous pensons que les prix des matières premières, notamment les prix alimentaires, resteront élevés au cours des prochains mois. L'environnement sera difficile pour l'ensemble des marchés émergents, mais il constituera un défi en Asie. La réponse des banques centrales consistera sans doute à conserver une attitude de fermeté ce qui ne manquera pas par la suite de favoriser l'appréciation des devises concernées. Pour nous, le récent repli constitue une excellente opportunité de constituer des positions longues dans les devises des pays particulièrement exposés à l'inflation (mais où la croissance est stable) comme Singapour, la Chine ou la Thaïlande.