La Banque centrale européenne (BCE) est en train de revoir sa position vis-à-vis des obligations convertibles sous condition («CoCos», pour Contingent Convertible Bonds), a rapporté dimanche le Financial Times. Une refonte de la réglementation serait en cours assure le quotidien économique qui évoque des discussions entre les représentants de l’institution monétaire et des responsables de la Deutsche Bank. La banque allemande aurait par ailleurs récemment décidé d’annuler une émission de CoCos.

Ces obligations hybrides, dont le but est de renforcer la solidité des grandes banques et d’éviter ainsi que leurs pertes ne soient répercutées sur les contribuables, ont été émises au sortir de la crise financière. Elles sont apparues alors comme le moyen idéal pour renforcer les bilans des banques puisqu’elles se convertissent immédiatement – et obligatoirement – en actions à partir du moment où les fonds propres de l’émetteur chuteraient en dessous d’un certain seuil.

Credit Suisse fut parmi les premières à recourir, dès 2011, à ces instruments d’un nouveau genre. Puis d’autres banques ont suivi à l’instar d’UBS. Dans une révision des conditions liées à son régime «too big to fail», le Conseil fédéral a proposé en octobre dernier que les exigences pondérées en fonction du risque des deux grandes banques d’importance systémiques soient remplies, au maximum, par 4,3% de CoCos d’ici à fin 2019. Et que la différence, soit au moins 10%, devait être couverte par des fonds propres de base durs (CET1).

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Trop d’incertitudes

Malgré tout, les CoCos pâtissent aujourd’hui de leur caractère incertain, que ce soit pour ce qui concerne leurs modalités de remboursement, leur date d’expiration ou leur rendement. Car à l’inverse des obligations convertibles ordinaires, leur conversion ne se fait pas au bon vouloir de l’investisseur ou en fonction de l’évolution des marchés.

Dans une note publiée au mois de mars, la Banque des règlements internationaux soulignait que les CoCos avaient participé, au même titre que la chute du pétrole ou le ralentissement de l’économie chinoise, à accroître la volatilité sur les marchés financiers. En cause: l’éventualité d’une «annulation inédite» de leurs paiements de coupon. Ces turbulences avaient d’ailleurs contraint début février la Deutsche Bank, après que son titre ait perdu 10% en une seule journée, a annoncé publiquement qu’elle disposait de réserves «suffisantes» pour procéder à des paiements liés aux CoCos.

Suite à ces inquiétudes des investisseurs quant à l’évolution de ces obligations hybrides au sein des bilans bancaires, la BCE a confirmé à la fin du mois de mars qu’une refonte de la réglementation en la matière était à l’étude. Il s’agissait alors de préciser les conditions qui pourraient entraîner des restrictions, voire l’annulation de paiements y compris de coupons, avait alors expliqué Danièle Nouy, présidente du Comité de supervision de la BCE.

Reste que les incertitudes qui entourent ces instruments financiers, qui représenteraient 93 milliards d’euros aujourd’hui selon le Financial Times, ne datent pas de cette année. En juillet 2014, l’Autorité européenne des marchés financiers (ESMA) s’était déjà inquiétée de savoir si les investisseurs comprenaient «entièrement les risques spécifiques liés aux cocos». Une semaine plus tard, c’est l’autorité de surveillance financière britannique (FCA) qui jugeait ces produits, en vertu de leur complexité, inappropriés pour les investisseurs de la banque de détail. Rien de tel toutefois en Suisse où leur distribution n’est pas assujettie à autorisation.