Que fera Alexandre Zeller? Le banquier vaudois, à Zurich depuis qu’il a pris la présidence de Six Group, l’opérateur de la bourse de Zurich entre 2013 et 2016, doit être élu à la présidence de l’unité helvétique de Credit Suisse. Or, cette dernière, qui devait être partiellement mise en bourse dans la deuxième partie de 2017, restera complètement dans le giron du groupe.

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L’élection de ce dernier doit intervenir vendredi, lors de l’assemblée générale. Il doit aussi être confirmé comme membre du conseil d’administration de Credit Suisse Group. «Le fait que l’entité suisse ne soit pas mise en bourse ne change rien à sa stratégie et elle reste une entité juridique séparée du groupe, donc son conseil d’administration reste nécessaire», explique un porte-parole. De fait, ajoute-t-il, Alexandre Zeller est déjà en fonction depuis l’automne dernier.

Performance désastreuse

Pourtant, de plus en plus de personnes le voient jouer un rôle plus important dans le groupe. Alors qu’Urs Rohner, président de Credit Suisse depuis 2011, âgé de 57 ans, est de plus en plus critiqué, d’aucuns voient le Vaudois, plus jeune d’une année, comme un parfait successeur.

Il faut dire que les critiques sont nombreuses. «Sous sa présidence, la performance de l’action a été désastreuse», explique Loïc Bhend, analyste spécialisé dans le secteur bancaire chez Bordier. En outre, il reproche à Urs Rohner d’avoir soutenu Brady Dougan, ancien directeur général de la banque, jusqu’à ce que cela devienne indécent, de n’avoir rien vu venir sur le manque grandissant de capital de la banque. Pour l’expert, «il a tout simplement multiplié les erreurs stratégiques.»

Soutiens internationaux

Ethos s’est affiché comme l’un des critiques les plus virulents d’Urs Rohner. Ce n’est plus l’homme de la situation, estime le directeur de la fondation, Vincent Kaufmann. Il semble qu’il garde le soutien de gros actionnaires étrangers. Pour beaucoup, l’affaire des bonus et la hausse de sa rémunération après deux années consécutives de perte ont eu l’effet de la goutte d’eau qui fait déborder le vase. Pourtant, Urs Rohner est surtout critiqué en Suisse. De fait, parmi les conseillers des investisseurs institutionnels, les américaine ISS ou Glass Lewis, aucuns ne recommandent de s’opposer à sa réélection, contrairement à Ethos et Actares en Suisse.

Ethos ne porte pas de candidat alternatif. Dans une interview à l’«Aargauer Zeiung», Vincent Kaufmann souligne qu’Alexandre Zeller ou Andreas Gottschling – également nouvel administrateur qui doit être élu vendredi – ont beaucoup d’expérience dans le secteur financier. Mais le remplaçant pourrait également venir de l’extérieur, a-t-il poursuivi, soulignant que «ce n’est vraiment pas à nous de proposer un nom».

Le site d’informations financières Finews ne s’est pas embarrassé de telles précautions. Dans plusieurs articles particulièrement virulents à l’égard du président actuel, le média souligne que pendant des années, l’argument pour soutenir Urs Rohner était tout simplement l’absence d’alternative. Or, d’après lui, elle existe désormais: «Pour la première fois, une option viable va se présenter à l’assemblée générale, lors de laquelle Urs Rohner va se faire étriller par les actionnaires.» Cette alternative, pour Finews, c’est Alexandre Zeller.

Banquier, pas avocat

Dans les milieux bancaires, Alexandre Zeller bénéficie d’un solide crédit. «C’est l’un des banquiers suisses les plus expérimentés, il a une vision stratégique, contrairement à Urs Rohner, qui, d’ailleurs, n’est pas un banquier, mais un avocat», explique un connaisseur de la place financière.

Ce serait aussi une façon de boucler la boucle pour Alexandre Zeller, qui, après un passage à Nestlé, a lancé sa carrière à Credit Suisse, grimpant les échelons dans la gestion de fortune, puis a pris la direction de la Banque cantonale vaudoise avant de prendre celle de HSBC en Suisse. Il a ensuite occupé la fonction de président de l’opérateur de la bourse suisse, SIX, qu’il a quitté l’an dernier pour rejoindre, à nouveau, Credit Suisse. Contacté, ce dernier n’a pas répondu à nos sollicitations. La banque, elle, ne commente pas.

Il reste néanmoins beaucoup de conditions pour qu’un tel changement se produise: une volonté d’Urs Rohner, qui semble n’en montrer aucune, de quitter la présidence, ou une pression suffisamment forte des actionnaires. Le vote sur sa réélection vendredi donnera un élément de réponse sur ce dernier point.

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