Des détails sur l’échange automatique d’informations

Alors que les informations se succèdent, il est utile de faire le point de la situation sur la pratique de l’échange de renseignements entre administrations fiscales, notamment entre la Suisse et la France. A l’avenir, les demandes groupées seront notamment autorisées

Dans un monde fiscal en profonde mutation et face à l’avalanche d’informations de toute part, il est certainement utile de faire le point de la situation sur la pratique de l’échange de renseignements fiscaux entre administrations fiscales, notamment entre la Suisse et la France.

En droit actuel, la clause d’échange de renseignements applicable entre la Suisse et la France résulte d’un avenant (27 août 2009) applicable aux demandes d’échange de renseignements concernant toute année civile ou tout exercice commençant à partir du 1er janvier 2010. Cet avenant se réfère à l’article 26 du modèle OCDE de 2005 et permet donc de lever le secret bancaire suisse; toutefois, les demandes d’ordre général et impersonnel («fishing expedition»), ne sont pas autorisées. Concrètement, la demande doit comprendre un certain nombre d’éléments précis tel que l’identification du contribuable qui est présumé détenir un compte en Suisse ainsi que l’identification de la banque dépositaire.

Il est utile de rappeler la teneur de l’article 10 de cet avenant: «L’autorité compétente requérante fournit les informations suivantes à l’autorité compétente de l’Etat requis:

a) le nom et une adresse de la personne faisant l’objet d’un contrôle ou d’une enquête et, si disponible, tout autre élément de nature à faciliter l’identification de la personne (date de naissance, état civil…);

b) la période visée par la demande;

c) une description des renseignements recherchés, notamment leur nature et la forme sous laquelle l’Etat requérant souhaite recevoir les renseignements de l’Etat requis;

d) le but fiscal dans lequel les renseignements sont demandés;

e) dans la mesure où ils sont connus, les nom et adresse de toute personne dont il y a lieu de penser qu’elle est en possession des renseignements demandés.

Les règles de procédure administratives relatives aux droits du contribuable s’appliquent dans l’Etat requis, sans pour autant que leur application puisse entraver ou retarder indûment les échanges effectifs de renseignements. Il est entendu que les Etats contractants ne sont pas tenus, sur la base de l’art. 28 de la Convention, de procéder à un échange de renseignements spontané ou automatique.»

Cette situation va cependant prochainement évoluer en regard de l’accord du 25 juin 2014 signé entre la Suisse et la France, et cela dès que les formalités requises seront achevées dans chacun des deux Etats. Du côté suisse, la ratification de l’avenant ne devrait pas intervenir avant 2016 ou 2017. Malgré cette échéance un peu lointaine, il est important de savoir que l’accord du 25 juin 2014 prévoit un effet rétroactif au 1er janvier 2010 pour les demandes individuelles et au 1er février 2013 pour les demandes groupées. Toutefois, cet accord exclut tout échange d’informations spontané et/ou automatique entre autorités fiscales. Comme jusqu’ici, des informations ne seront fournies qu’au cas par cas, en réponse à une demande.

Il est intéressant de relever que, dans cet accord, les deux Etats pourront formuler des demandes groupées. Par exemple, si le fisc français a identifié des transactions réalisées en France, notamment payées par cartes bancaires émises par une banque suisse, dont la fréquence, la configuration des transactions et le type d’utilisation peuvent laisser présumer que les titulaires sont des résidents fiscaux français, le fisc français pourra obtenir des autorités suisses les nom et adresse de ces contribuables (la France utilisant le nouveau fichier Tracfin mis en place depuis le 1er avril 2014).

Pour les pays de l’Union européenne, les progrès de la norme sur l’échange de renseignements sur demande ne sont pas suffisants pour combattre efficacement la fraude consistant à ne pas déclarer des avoirs détenus à l’étranger, les revenus et plus-values correspondants. C’est pourquoi la Commission européenne a proposé, le 12 juin 2013, de mettre en vigueur l’échange automatique d’informations, dès le 1er janvier 2015. Cet échange visera les dividendes, les plus-values, les autres revenus financiers et les soldes des comptes.

Ce principe a été repris dans le cadre de l’OCDE, et la communauté internationale a aussi adopté le principe de l’échange automatique de renseignements. L’OCDE a élaboré la norme d’échange automatique de renseignements relatifs aux comptes financiers, qui a été approuvée et mise en diffusion générale le 17 janvier 2014 par son Comité des affaires fiscales. La version complète de la norme mondiale d’échange automatique de renseignements a été publiée le 21 juillet 2014. Cette norme comporte les modalités techniques de son application, et surtout son commentaire interprétatif.

En résumé, l’échange automatique d’informations consistera, pour les «banques» dans lesquelles des comptes bancaires ont été ouverts par des personnes physiques ou morales non-résidents, à transmettre les montants de revenus, directs ou par personnes interposées (y compris les intérêts, dividendes, les revenus de contrats d’assurance vie et autres types analogues de revenu) ainsi que les soldes de comptes et produits de ventes d’actifs financiers à l’administration fiscale du pays de siège de la «banque». Cette administration fiscale transmettra toutes ces informations à l’administration fiscale des pays de résidence des détenteurs de comptes, qu’ils soient personnes physiques ou personnes morales.

La Suisse a approuvé l’adoption de la nouvelle norme mondiale concernant l’échange automatique de renseignements à la suite de sa publication par l’OCDE. Mais cette norme n’entrera en vigueur qu’après l’adaptation de nos lois et après l’aboutissement des négociations «Etat par Etat» et avec l’Union européenne. Notre pays souhaitant, d’une part, l’ouverture du marché européen aux banques suisses et, d’autre part, une égalité de traitement dans les situations d’exclusion à l’échange automatique comme, par exemple, les Etats-Unis l’ont déjà demandé.

Il est donc délicat de prévoir, pour la Suisse, une date d’entrée en vigueur de l’échange automatique. A priori, elle pourrait intervenir vers fin 2017, voire en 2018.

* Expert fiscal diplômé

Le passage à l’échange automatique pourrait intervenir vers la fin de 2017, voire en 2018