Au cœur des marchés
Le président français fait face à un environnement délétère pour le projet de relance de l’intégration européenne

Dès la campagne présidentielle, Emmanuel Macron s’était posé en champion de l’Europe contre les eurosceptiques de tout poil sur la scène gauloise. Dans l’euphorie de sa victoire, le président français s’est lancé dans une vraie campagne pour convaincre ses partenaires du Vieux Continent d’engager une relance de construction européenne. Rappelons-nous sa visite immédiate à Berlin. Ses propositions relatives à un approfondissement de l’union monétaire et à un renforcement du fédéralisme fiscal et budgétaire n’ont pas, dès le départ, suscité un enthousiasme marqué de la part du partenaire allemand. Il est vrai qu’Angela Merkel avait beau jeu de tempérer les ardeurs de son collègue, elle qui devait faire face à une élection majeure à l’automne 2017.
On connaît la suite, marquée par un affaiblissement de la position de la chancelière, obligée de compter avec une extrême droite renforcée au parlement et de reconduire difficilement la grande coalition CDU-CSU-SPD. Une configuration qui n’a pas généré de compromis susceptible d’être entériné ce mois, puisque les négociations pour former un nouveau gouvernement germanique ont été longues et laborieuses.
Bras de fer entre l’Europe et les populistes
En outre, les doutes sur la capacité du sommet européen à déboucher sur des résultats concrets n’ont fait que croître, les membres du groupe de Visegrad (Pologne, Hongrie, République tchèque, Slovaquie) n’ayant eu de cesse de défier l’Europe et d’affirmer leur volonté de lutter contre toute tentative de réduire leur souveraineté nationale.
Dans ce contexte, les développements récents en Italie et, dans une moindre mesure, en Espagne ont «ajouté une couche» à cet environnement délétère pour le projet de relance de l’intégration européenne. On est désormais confronté à un bras de fer entre l’Europe et les populistes italiens. Peut-on espérer que le tout prochain sommet débouche sur une solution réelle ou faut-il se faire à l’idée qu’il ne peut que conduire à la confirmation de l’incapacité de l’Europe à sortir du marasme institutionnel et de l’absence de vision qui la caractérisent depuis de nombreuses années?
Pression baissière sur le dollar
On dira que les pessimistes ont le vent en poupe au regard des faits. Alors s’agit-il d’un non-événement? Attention de ne pas aller trop vite en besogne. Un actif pourrait réagir au résultat du conseil européen de la fin du mois: le dollar américain. Un sommet de la fracture pourrait renforcer la devise américaine.
Est-ce à dire que nos prévisions de dépréciation de cette dernière à moyen terme doivent être reconsidérées? Nous n’en sommes pas convaincus, car les fondamentaux nous semblent militer en faveur d’un dollar plus faible. Il faudra néanmoins peut-être reconsidérer, à la lumière du résultat du conseil, l’horizon temps nécessaire pour voir fléchir la devise de l’Oncle Sam. A moins que l’Europe ne se fracture fortement et définitivement à l’issue de la réunion de juin…
En conclusion, même s’il n’y a pas grand-chose à en attendre, il faut porter un œil attentif à la réunion de fin juin, au cours de laquelle les ambitions d’Emmanuel Macron ne devraient pas triompher.