Fonds de placement. Questions à Luís Correia. «Le problème de la fin des brevets perd de son acuité pour Pfizer»
Questions à Luís Correia, gérant à Zurich du Clariden Healthcare Equity Fund.
Luís Correia analysait pour Roche, à Bâle, les sociétés et les médicaments susceptibles d'être repris. Il a aussi travaillé en tant que chimiste organique dans un laboratoire de recherche et le développement des médicaments. C'est dire s'il connaît de l'intérieur cette industrie. Depuis un an, il a repris la gestion d'un fonds en actions de la santé, le Clariden Healthcare Equity Fund.
Le Temps: Peut-on encore dire que les actions pharmaceutiques sont défensives?
Luís Correia:Elles le sont, la dernière baisse de mai l'a encore montré. Elles dépendent peu du cycle économique, la demande de médicaments progresse plus vite que celle du produit intérieur brut. Comme elles sont peu endettées, elles sont peu sensibles aux progressions des taux d'intérêt.
- Quelles sont les perspectives pour les titres de la santé, un groupe qui comprend, à côté des sociétés pharmaceutiques, les fabricants de prothèses, les fournisseurs d'hôpitaux et des sociétés de services?
- D'ici à la fin de l'année, elles feront mieux que le reste du marché après une sous-performance qui a duré trois ans. Cette dernière s'explique par deux raisons. Entre 2000 et le premier trimestre 2003, elles n'avaient pas corrigé autant que les restes de la Bourse, elles s'étaient nettement mieux comportées que les autres entreprises de la technologie. Le marché était attentif au problème de l'expiration des brevets et de la concurrence des médicaments génériques qui en résulte.
Je pense que le marché sous-estime la croissance des ventes des pharmaceutiques. Il y a de la place pour des surprises positives.
Actuellement, les investisseurs commencent à comprendre que le problème de la fin des brevets perd de son acuité pour Pfizer et ses concurrentes. Certes, la grande vague d'expiration est pour cette année et l'année prochaine, mais les investisseurs ont tendance à anticiper et ils regardent déjà 2008. De plus, les sociétés pharmaceutiques (ndlr: qui représentent 63% du fonds et presque autant de l'indice), sont dans une meilleure situation pour surmonter ce problème.
- Comment s'en sortent-elles?
- Elles adoucissent la période de la fin des brevets. Prenez, par exemple, une pastille luttant contre l'insomnie. Sous sa version initiale, elle était efficace pendant 6 heures. En la modifiant, sans changer la molécule active, son efficacité peut très bien être prolongée à 8 heures. Les extensions peuvent aller d'un à 15 ans, mais souvent les producteurs de médicaments génériques contestent leur validité. Cela se termine fréquemment devant les tribunaux.
- Le fonds sous-pondère largement les sociétés de la technologie médicale (les prothèses) et les fournisseurs d'hôpitaux, pourquoi?
- Les producteurs de défibrillateur cardiaques que l'on implante sur les patients sont affectés par un projet de l'assurance maladie américaine d'Etat: Medicare. Cette dernière veut réduire ses remboursements aux hôpitaux des opérations d'implantation. Par ailleurs, des produits de Boston Scientific, un grand producteur, ont des défauts. Il a fallu les extraire des patients. A cette occasion, certains médecins se demandent si de tels défibrillateurs cardiaques sont pertinents.
Du côté des implants orthopédiques, la progression des prix de ventes ne devrait pas être aussi forte que par le passé. Les hôpitaux sont en train de considérer que les produits des différents fabricants sont interchangeables et ils vont plus largement faire jouer la concurrence.
- Allez-vous changer le profil de risque du fonds?
- Le fonds était conçu comme un élément de base de la construction d'un portefeuille, à côté de notre fonds sur les fabricants de génériques et celui sur les titres de la biotechnologie. Aujourd'hui il est considéré comme un fonds à part entière. Les produits d'investissement de la concurrence ont souvent 20% à 30% de sociétés de la biotechnologie, qui ont un bêta plus élevé: elles progressent plus rapidement quand la Bourse gagne du terrain. Je vais en tenir compte et accroître le bêta du fond en achetant plus de petites capitalisations et plus de sociétés biotechnologiques. Je le ferai quand la Bourse donnera des signes plus tangibles d'un rebond.