Qu’a gagné l’an dernier un investisseur qui aurait confié ses avoirs à une banque ou un gérant suisse avec un niveau de risque moyen? En moyenne 6,05% après les frais de gestion, pour un portefeuille en francs, selon des statistiques de la plateforme Performance Watcher publiées le 18 janvier. Ce chiffre est basé sur les performances de 1773 portefeuilles réels représentant 3,8 milliards de francs d’avoirs. Leurs données ont été partagées avec la plateforme, qui veut permettre aux clients des banques suisses de comparer le travail de leur gestionnaire avec l’ensemble du marché.

Cette performance moyenne peut également être comparée avec un portefeuille fictif, simplifié à l’extrême, composé de 50% d’obligations (35% domestiques et 15% étrangères) et de 50% d’actions (là encore 35% domestiques et 15% étrangères). Ce «dumb portfolio», bâti avec quatre ETF et nécessitant très peu d’interventions humaines, aurait généré 9,47% l’an dernier, après avoir retranché des frais annuels de 0,75% – probablement inférieurs aux commissions prélevées par la majorité des gestionnaires et des banques.

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L’écart entre les portefeuilles réels et ce «portefeuille idiot» s’est surtout creusé pendant deux périodes au cours de 2021. Entre début juin et début septembre tout d’abord. Les gérants suisses ont moins performé que le marché dans son ensemble car ils avaient en moyenne opté pour un positionnement moins risqué lorsque les marchés ont connu une nouvelle phase de hausse à partir de mi-mai, selon les chiffres de Performance Watcher, qui mesure les performances mais aussi les niveaux de risque pris. Ce n’est que mi-juillet que les gestionnaires helvétiques ont dans l’ensemble remis du risque dans les portefeuilles. Beaucoup étaient donc trop investis quand les marchés se sont calmés durant le mois de septembre.

Jouer la sécurité

L’indice S&P 500 des grandes capitalisations américaines (+28,8% en 2021) a ainsi progressé de 11,6% entre le 12 mai et le 2 septembre, avant de perdre 5,2% jusqu’au 4 octobre. Son équivalent suisse, le SMI (+20% en 2021), a suivi une trajectoire similaire, avec un gain de 14% entre le 11 mai et le 18 août, puis un recul de 8,45% au 28 septembre.

La phase de correction de l’automne n’a pas incité les gérants suisses à remettre du risque pour la fin de l’année. C’est à partir de ce point que se trouve la deuxième période d’écart avec l’indice simpliste de Performance Watcher. Les gérants ne s’attendaient probablement pas à un rally de fin d’année ou craignaient même une correction en décembre. La majorité a donc joué la sécurité, alors que le S&P 500 a bondi de 10,8% entre début octobre et fin décembre, tandis que le SMI faisait encore mieux, à +12%. Sur l’année, la moyenne des portefeuilles suisses suivis par Performance Watcher affiche une volatilité de 4,79% pour un portefeuille de risque moyen, soit moins de la moitié du niveau de risque de l’indice des actions mondiales.

Violentes rotations sectorielles

L’exercice 2021 a été marqué par de violentes rotations sectorielles sur les marchés actions (lorsqu’un type d’actions devient très recherché, au détriment d’un autre), surtout à partir du mois de mai. Ces mouvements ont été difficiles à suivre pour les gérants appliquant une stratégie active, souvent pris à contre-pied. Certains parlant même d’année «portes de saloon» pour décrire le choc reçu lors des rotations sectorielles.

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La comparaison entre les résultats réels enregistrés par les gérants et le portefeuille «idiot» créé par Performance Watcher est aussi limitée par le côté sur-mesure de la gestion de fortune. Idéalement, les options prises par les gestionnaires doivent aussi être dictées par la situation et les besoins du client. Comme le niveau de revenu qu’il espère, la perspective de dépenses importantes ou les lieux dans lesquels il passe une partie importante de son temps (ce qui conditionne son besoin de devises)

Enfin, un portefeuille en francs avec un niveau de risque faible a en moyenne gagné 3,39% l’an dernier, pour une volatilité de 2,94%, toujours selon Performance Watcher. Un profil de risque plus élevé a pour sa part généré un gain de 10,7%, avec un niveau de risque de 6,7%.