Investir en fonction du risque climatique: «Nous mesurons la température de notre portefeuille»
Finance durable
Ne pas exclure par défaut, mais cibler en fonction de l’intégration du risque lié au climat dans un modèle d’affaires. Telle est la stratégie d’investissement d’un fonds lancé par CPR Asset Management. La filiale du géant français Amundi traque l’empreinte carbone des entreprises avec l’aide d’une ONG

Les émissions de CO2 peuvent-elles être un critère de sélection des entreprises dans lesquelles investir? CPR Asset Management, filiale d’Amundi, utilise cette stratégie pour un fonds lancé en décembre dernier, en collaboration avec l’ONG anglaise CDP, anciennement appelée Carbon Disclosure Project. Les explications du gérant, Alexandre Blein.
Le Temps: Vous sélectionnez les entreprises dans lesquelles vous investissez selon leurs émissions de CO2. En quoi consiste votre approche?
Alexandre Blein: Nous ciblons les entreprises qui ont intégré le risque climatique, c’est-à-dire qui diminuent leur impact carbone ou qui se sont engagées à le faire. Pour le scénario d’une limitation du réchauffement climatique à 2 degrés, issu de l'Accord de Paris, les émissions de gaz à effet de serre devront diminuer de 40 à 70% au niveau mondial d’ici à 2050. Mais dans le même temps, la production d’électricité devra augmenter d’environ 40% pour répondre à la croissance économique et démographique. Le mix énergétique doit donc évoluer, avec une baisse des énergies fossiles et une montée des énergies renouvelables.
Vous pourriez aussi investir dans des producteurs d’énergies renouvelables, pour obtenir un résultat similaire.
Les fonds spécialisés dans les panneaux solaires ou les parcs éoliens sont exposés à des risques spécifiques. Nous permettons à nos clients de décarboner leur portefeuille en pouvant investir sur l’ensemble du marché, car tous les secteurs d’activité sont concernés par la nécessité de diminuer les émissions de gaz à effet de serre. Notre but est de créer une méthodologie permettant de mesurer la température de notre portefeuille, c’est-à-dire la trajectoire des émissions des entreprises dans lesquelles nous sommes investis, en degrés.
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Procédez-vous à des exclusions systématiques, par exemple des secteurs les plus polluants?
Nous n’excluons aucun secteur par défaut. Il subsistera en effet toujours une part d’énergies fossiles pendant la transition énergétique. Nous partons de l’indice MSCI World et nous mesurons la performance climatique des entreprises.
Comment?
Nous avons un partenariat exclusif avec l’ONG anglaise CDP, précédemment appelée Carbon Disclosure Project. Depuis 2000, elle demande à plusieurs milliers d’entreprises, de villes ou de régions leurs données sur leur empreinte écologique et leur attribue des notes. Parmi les sociétés cotées, nous ne conservons que celles qui connaissent leurs émissions et ont défini des axes d’amélioration, ou se sont engagées à le faire, avec des objectifs précis. Nous appliquons ensuite les critères ESG d’Amundi, notre maison mère, avec une focalisation sur les aspects environnementaux. Enfin, nous utilisons un filtre de controverse pour écarter les entreprises ayant de mauvaises pratiques. Nous faisons une gestion classique de stock picking sur notre univers d’investissement final, qui contient environ 700 titres, avec une bonne distribution au niveau des secteurs.