A la recherche du graal
Et si on revenait aux fondamentaux? Et si on basait notre évaluation sur ce qu’on connaît et pas sur ce qu’on doit estimer? Mais dans le fond, que connaît-on, s’agissant des actions? Pas grand-chose, à part le dividende et son corollaire: le rendement au dividende. Et si on basait notre évaluation sur ce seul critère? Quels sont d’abord ses avantages?
Premièrement, il est ancré dans la réalité: le dividende est payable en cash. Ce n’est pas une promesse de rendement futur, c’est de la trésorerie aujourd’hui.
Deuxièmement, il reflète un engagement concret du management: il représente le résultat d’une négociation entre le conseil d’administration (représentant l’actionnaire) et la direction de l’entreprise. Il est le résultat d’une lutte saine, la direction cherchant en général à minimiser le dividende pour pouvoir réinvestir et croître, le conseil cherchant, lui, généralement à le maximiser pour favoriser son actionnaire (ce dernier approuvant la distribution). Donc une décision consensuelle, impliquant tous les acteurs, et responsable: un management qui coupe le dividende est un management mort! On est loin des concepts théoriques sur lesquels reposent les autres modèles en général.
Les actions moyennement chères
Troisièmement, il est fiable puisqu’il lisse la volatilité des bénéfices annuels, des free cash-flows et autres facteurs traditionnellement utilisés. Prenez l’exemple des sociétés pétrolières. Les revenus, les bénéfices, les cash-flows dépendent en grande partie du cours du pétrole. Leur dividende reste, lui, assez stable ou croît de façon régulière au fil des ans, parce que le management connaît bien sa marge de manœuvre, ce qu’il peut distribuer sans mettre la société (et surtout lui-même) en péril. Donc, contrairement aux modèles théoriques reposant sur des hypothèses, le dividende répond à un certain nombre d’éléments réels.
Le graal est trouvé. Hourra! Et que nous dit le dividende aujourd’hui sur le niveau de valorisation des marchés? Avec un rendement au dividende de 1,8% pour les marchés américains et japonais, de 3,4% pour le marché européen, de 3,1% pour la Suisse ou encore de 2,5% pour les pays émergents, les actions se trouvent globalement à un niveau de cherté en ligne avec son historique. Ni plus ni moins.
Utile? Oui. Rassurant? Oui et non, puisque l’expérience (ou la sagesse ou l’âge) m’a fait aussi comprendre que ce n’est pas le niveau de valorisation en lui-même qui fait monter ou baisser le marché. Les modèles de valorisation sont de mauvais indicateurs des mouvements futurs. On n’achète (ou ne vend) pas à cause d’un modèle, quel qu’il soit, mais parce que les facteurs qui l’influencent se modifient. J’en suis donc à recommencer à analyser les taux d’intérêt, la croissance, la rentabilité, et donc à refaire des modèles…