Néobanques: une leçon d’opportunisme bancaire
L’arrivée des néobanques montre bien que les établissements même traditionnels sont capables d’offrir des tarifs très avantageux. Alors qu’ils ne cessent de se plaindre des taux négatifs et des marges sous pression

Néobanque. Le terme fait un peu fuir. Sans compter que ces nouveaux acteurs s’adressent à nous avec ce tutoiement infantilisant encore plus rebutant, quel que soit notre âge. Et puis, il y a ce sentiment un peu vertigineux d’imaginer que toutes nos affaires bancaires ne seront plus consignées que dans notre téléphone.
Et pourtant, on aurait tort de ne pas s’intéresser aux applications bancaires sur smartphone. De plus en plus nombreuses, elles sont proposées par une gamme d’acteurs toujours plus large, de la fintech étrangère à la start-up suisse, en passant par la grande banque helvétique établie.
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Elles ont en commun d’être pratiques et simples d’utilisation. Elles se démarquent en étant très bon marché dans un secteur où la hausse des frais est une constante: en vingt ans, ils ont quasiment doublé. Que cette nouvelle offre quasi gratuite se développe est pour le moins un paradoxe, tant les banques se sont plaintes de leurs marges comprimées. Invoquant les taux d’intérêt négatifs imposés par la Banque nationale, elles n’ont cessé ces dernières années d’ajuster les tarifs et de baisser les seuils à partir desquels elles imposaient elles aussi cette ponction.
Occuper le terrain
Une app bancaire, une fois développée, demande évidemment moins de frais qu’un compte à l’ancienne, surtout s’il implique des discussions – tout de même de plus en plus rares – avec son banquier. Les néobanques nécessitent peu, voire pas du tout, d’agences, beaucoup de standardisation et d’automatisation pour des clients qui, de toute façon, préfèrent souvent faire les choses eux-mêmes.
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Que des start-up décident d’occuper ce terrain en utilisant l’argument des prix, cela paraît normal. Mais que dire des banques qui les soutiennent ou qui développent leurs propres apps? On peut comprendre une partie de leur logique: elles n’ont certainement pas d’autres choix que d’investir ce créneau, au risque de se faire siphonner une clientèle jeune et prometteuse par des acteurs étrangers ou non bancaires.
Le problème, c’est que, à quelques exceptions près, elles le font sans scrupules par rapport à leurs clients traditionnels, qui paient le prix fort et restent donc, eux, les plus rentables. Cette dématérialisation justifie-t-elle qu’une offre ne coûte rien, tandis qu’un compte plus traditionnel coûte plus de 100 francs par an (sans compter les éventuels taux négatifs)? On peine à le croire. Il ne nous reste plus qu’à espérer que cette nouvelle concurrence pousse ces établissements à réfléchir à leur politique de prix, qui ressemble de plus en plus à une leçon d’hypocrisie et d’opportunisme.
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