La parité euro-dollar et le prix du baril sont au cœur des inquiétudes

La croissance mondiale restera soutenue par les Etats-Unis

La fédération Macro Network, composée des macro-économistes de l’ISAG (Genève) et de BSI Economics (Paris), vient de publier son consensus pour le 2e trimestre 2015 et révèle des éléments inédits sur les principales problématiques suivies par les spécialistes européens, le scénario macroéconomique et financier dominant, les événements clés attendus affectant la croissance économique et les prix des actifs sur les trois prochaines années, et les points faisant l’objet des plus vifs débats.

Le scénario majoritaire anticipe une croissance modérée de l’activité économique mondiale, principalement soutenue par le dynamisme américain. Cet optimisme est atténué par des perspectives à moyen-long terme plus moroses en Europe et d’importantes disparités chez les pays émergents exposés à une remontée des taux par la Réserve fédérale (Fed). Si les enjeux macroéconomiques rassemblent un consensus croissant, les avis demeurent divergents sur l’évolution des marchés financiers, notamment sur la valorisation des actifs financiers européens, le prix du Brent et la parité euro-dollar.

Sept préoccupations sont évoquées: (1) un prix du Brent inférieur à 70 dollars d’ici à 2017; (2) l’efficacité de la politique monétaire de la Banque centrale européenne (BCE) pour relancer le crédit et l’activité en zone euro; (3) des taux longs durablement inférieurs à 1% d’ici à fin 2016; (4) une inflation supérieure à 3% aux Etats-Unis d’ici à un an; (5) la sensibilité des comptes courants des pays émergents en réaction à la prochaine normalisation des taux de la Fed; (6) un retour de la récession dans l’Union européenne (UE) dès 2016; (7) la parité euro-dollar au premier semestre 2015.

La conjoncture économique en zone euro inspire la prudence pour la grande majorité des économistes interrogés (79%). Ainsi, l’inflation n’est pas attendue à 2% avant mi-2016, et ce malgré le rejet d’une hypothèse de récession à fin 2015. Le rachat d’actifs actuellement mené par la BCE soutiendrait ainsi davantage le crédit et l’activité dans un premier temps, reléguant les risques politiques et institutionnels au second plan. En outre, ni les négociations Grèce-troïka (le remboursement de la dette publique est jugé inadéquat avec la trajectoire économique du pays), ni l’élection potentielle d’un parti eurosceptique dans un pays membre de la zone, ne seraient susceptibles d’affecter fortement l’économie mondiale ou les marchés financiers.

L’activité globale serait soutenue durablement par la croissance américaine et se traduirait par un taux de chômage américain inférieur à 5% d’ici à la fin de l’année. Ce dynamisme serait cependant graduel et ne permettrait pas d’atteindre une inflation supérieure à 3% d’ici à 12 mois. Dans ce contexte de hausse des prix aux Etats-Unis, la remontée des taux directeurs par la Fed devrait affecter la balance courante des pays émergents, qui souffrent en outre d’un ralentissement de la croissance chinoise. Point positif: la croissance économique indienne est attendue en forte hausse mais sans toutefois atteindre le niveau de contribution de l’économie chinoise à la croissance mondiale.

Le consensus est en revanche très partagé sur la progression des marchés financiers. Si une majorité des économistes s’accorde sur des taux longs inférieurs à 1% dans les pays développés pour les deux prochaines années, l’incertitude domine sur des sujets dont le risque est pourtant jugé significatif pour l’économie mondiale et les marchés financiers. C’est notamment le cas d’une hypothèse du prix du baril inférieur à 70 dollars jusqu’en 2017, qui est acceptée par seulement la moitié des économistes.

La parité euro-dollar ferait également peser des risques significatifs sur l’activité économique, tandis que les marchés financiers seraient sous la menace (1) d’une éventuelle correction de 10% du marché mondial des actions et (2) d’une moindre revalorisation des actifs en zone euro en dépit de la mise en place d’un assouplissement quantitatif par la BCE.

* Vice-président Macro Network, ISAG ** Vice-président Macro Network, BSI Economics

L’incertitude domine sur des sujets dont le risque est pourtant jugé significatif pour l’économie mondiale